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OH MON BEAU MIROIR ! Dis-moi si mon établissement est homophobe et sexiste ?

mercredi 10 août 2011, par Andy

Interrogez-vous responsables d’établissement d’éducation :

 a. Partagez-vous l’opinion que l’école est censée apporter les clés de l’épanouissement personnel ?
 b. Si oui, que faites-vous pour les jeunes qui se sentent différents ? Et en particulier, pour ceux qui se sentent attirés par les personnes de leur propre sexe ?
 c. Abordez-vous dans les discussions, le centre documentaire, les cours ... les questions homosexuelles ? de manière directe (sujet de cours), indirecte ( sujet transversal), hors cursus (ciné-club, conférences,... ) ?
 d. L’encadrement éducatif, les profs sont-ils sensibilisés à ces questions ? Comment ?
 e. Estimez-vous que vos élèves ne sont pas concernés par l’homosexualité et la bisexualité ?
 f. Avez-vous déjà reçu du courrier de vos anciens affirmant qu’ils sont des adultes gays et lesbiennes ? (cf. la "back-to-school campaign" du G.L.S.E.N. Gay, lesbian and straight education network)
 g. Réservez-vous le domaine de l’éducation sexuelle à la famille ? Pourquoi ? Ne pensez-vous pas que ces questions relèvent aussi de la formation du citoyen et de la personnalité- des missions en définitive nettement scolaires ?
 h.Craignez-vous les réactions parentales ? Les équipes éducatives ont-elles réfléchies au problème ?
 i. Vos élèves, n’ont-ils jamais soulevé la question ? directement ? indirectement ?
 j. Êtes-vous conscient des problèmes d’intolérance à l’égard des jeunes homos ? Êtes-vous informé des conséquences ? N’avez-vous jamais entendu des insultes telles que "pédé, tapette, o gouine" prononcées par des adultes ? Avez-vous été témoin de violences physiques à l’égard de jeunes perçus comme homosexuels ou ouvertement homosexuels ? brimades, harcèlement, coups & bagarres ?
 k. Pensez-vous que vous avez des élèves gays qui ne s’affichent pas par crainte de sévères violences physiques ou verbales à leur égard ?
 l. Avez-vous déjà travaillé avec des profs qui sont ouvertement homosexuel-le-s, ou que vous pensez gays o lesbiennes ? Avez-vous tenté de discuter de la problématique "éducation et homosexualité" sous un angle pédagogique (sans recherche d’ "aveu"...) ?

ALORS POURQUOI TAISEZ VOUS LES QUESTIONS HOMOSEXUELLES DANS VOS COURS, DANS VOTRE ÉTABLISSEMENT SCOLAIRE ?

 Méditez : Kevin Jennings, directeur du GLSEN déclare : "il existe une forme (d’homophobie) institutionnalisée d’abus d’enfant dans la société et dans les écoles en particulier"... La mission du GLSEN est de faire en sorte que "chaque école des Etats-Unis soit un bon lieu où tous les élèves et tous les enseignants se sentent respectés et valorisés, sans égard à leur orientation sexuelle". L’ultime but de l’organisation est que plus aucun enfant n’aille à l’école et n’apprenne à haïr les gens parce qu’ils sont gays ou lesbiennes- et que nul enseignant-e ne perde son poste car il/elle est homosexuel-le.

 Michel Foucault déclarait : « "Les professeurs qui, pendant des siècles, ont enseigné aux enfants combien l’homosexualité était intolérable et qui ont purgé les manuels de littérature, falsifié l’histoire afin d’en exclure ce type de sexualité, ont causé plus de ravages que le professeur qui parle d’homosexualité et ne peut faire d’autre mal qu’expliquer une réalité donnée, une expérience vécue. »

 Fier de son coming-out qui agita un temps son université, David Halperin se rendit compte des effets néfastes de celui-ci sur ses recherches universitaires. S’il gagna le respect, voire la sympathie de ses collègues, il lui apparût que ses travaux furent compris par le monde universitaire au travers du seul prisme de son homosexualité . N’affirmait-il pas cela ou bien ne théorisait-il pas cela car il était gay ? Son affect n’influe t-il pas ses recherches ? David Halperin écrit dans son ouvrage récemment traduit en France : " J’avais pensé que le coming out permettait précisément d’ôter aux autres leur point de vue privilégié sur moi et ma sexualité ; le coming out m’avait semblé être le moyen d’en retirer aux autres l’initiative et de récupérer à mon compte le droit et la possibilité d’interpréter le sens de mes paroles et de mes actions. Hélas, je découvris à mes dépens que, dès lors que vous êtes connu comme homosexuel, cette visibilité même, loin de vous préserver du ragot venimeux, vous expose au contraire au pouvoir des autres, et notamment à leur pouvoir de dire n ’importe quoi à votre propos, avec l’assurance, d’ailleurs justifiée, qu’ils seront crus sur parole (et, puisqu’on ne peut à peu près rien faire contre cela, il est inutile d’essayer de se faire bien voir en adoptant un « bon comportement »)." (page 29) David Halperin écrit plus loin (page 45) :" Qu’ est-ce que le placard (la dissimulation de sa propre homosexualité), sinon le produit de relations complexes de pouvoir ? La seule raison d’être dans le placard, c’est qu’on veut se protéger contre les formes, innombrables et violentes, de disqualification qu’on aurait à subir si son identité sexuelle discréditable était plus largement connue. Rester dans le placard, cacher son homosexualité, c’est aussi se soumettre à l’impératif social imposé aux gays par les non gays, et qui consiste pour ces derniers à se protéger non pas tant de la connaissance de l’homosexualité de quelqu’un, mais plutôt de la nécessité de reconnaître la connaissance de l’homosexualité de quelqu’un. Il n’est donc pas possible de considérer le placard comme un espace de liberté (même s’il offre à ses occupants des possibilités qui seraient impensables autrement et leur donne accès à certains des privilèges qui sont réservés à ceux qui se définissent comme hétérosexuels). A l’inverse, s’il y a dans le fait de sortir du placard (to come out of the closet) quelque chose d’une affirmation de soi, quelque chose de libérateur ; ce n’est pas parce que ce geste ferait passer d’un état de servitude à un état de liberté totale. Au contraire : sortir du placard, c’est précisément s’exposer à d’autres dangers et à d’autres contraintes, car c’est faire de soi-même une sorte d’écran sur lequel les hétérosexuels peuvent commodément projeter tous leurs fantasmes à propos des gays. C’est donc devoir supporter que chacun de vos gestes, chacune de vos paroles, de vos opinions, seront entièrement et irrévocablement marqués par les significations sociales accolées à l’identité homosexuelle dès lors qu’elle est affirmée au grand jour. Si sortir du placard est bien le geste par lequel on se délivre soi-même d’un état de non liberté, ce n’est pas parce que cela permettrait d’échapper à l’emprise du pouvoir pour s’installer dans un lieu extérieur à celui-ci. Mais c’est plutôt parce que cela définit un nouvel état des relations de pouvoir et transforme la dynamique des luttes personnelles et politiques. Sortir du placard est un acte de liberté, non pas dans le sens d’une libération, mais dans le sens d’une résistance."—David Halperin, Saint-Foucault, Editions EPEL.

 Est-il souhaitable qu’un enseignant s’affiche en tant qu’homosexuel ?

Il serait bienvenu que les enseignant-e-s gays et lesbiennes s’assument, afin de briser le cercle vicieux de l’homophobie qui nuit aux jeunes, mais qui leur nuit aussi à eux enseignants. Afin de donner des modèles vivants de ce que peut être une personne homosexuelle. Il n’est pas aisé de briser les tabous, et le milieu scolaire et parental est plutôt hostile. Si les enseignant-e-s homosexuel-le-s ne risquent rien en théorie en faisant leur coming out (Art. 8 Cst.), il n’en va pas de même en pratique. Du moins ce sont les préjugés qui prévalent. En fin de compte, que "risque"-t-on vraiment si ce n’est être soi-même ? La visibilité reste le seul et le meilleur moyen de légitimation de cette forme d’amour. Chacun est seul responsable pour tous.>> Réponse de Lambda Education, Stéphane Riethauser. Lambda est une organisation de production et diffusion de matériels pédagogiques sur les questions relatives, notamment, à l’homosexualité.