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Programme Kolebi en détail

mercredi 7 août 2002, par Andy

L’homosexualité à l’école, traduction du dossier "Holebi’s" (Homosexuels, lesbiennes et bisexuels) rédigé par l’équipe de "Klasse", projet de communication du Département de l’Enseignement du Ministère de la Communauté flamande.

Comment aborder la question de l’homosexualité à l’école ? Quels sont les préjugés qui y circulent ? Comment lutter contre les discriminations dont sont victimes élèves et professeur(e)s gays et lesbiennes ? Quelle approche de l’homosexualité au niveau de l’établissement scolaire, de la classe et au niveau individuel ? Témoignages et réactions sont également présentés.
http://www.enseignement.be/index.php?page=25938&id=4582
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Introduction :

Le dossier HL’homosexualité à l’école, traduction du dossier "Holebi’s" (Homosexuels, lesbiennes et bisexuels) rédigé par l’équipe de "Klasse", projet de communication du Département de l’Enseignement du Ministère de la Communauté flamande.

Comment aborder la question de l’homosexualité à l’école ? Quels sont les préjugés qui y circulent ? Comment lutter contre les discriminations dont sont victimes élèves et professeur(e)s gays et lesbiennes ? Quelle approche de l’homosexualité au niveau de l’établissement scolaire, de la classe et au niveau individuel ? Témoignages et réactions sont également présentés.
http://www.enseignement.be/index.php?page=25938&id=4582
olebi’s1 que vous pourrez lire ci-après est la traduction d’un dossier
pédagogique paru dans la revue du Département de l’Enseignement du Ministère
de la Communauté flamande Klasse voor leerkrachten2 Ce dossier est accessible
dans sa version originale sur le site de Klasse3. Il est aussi disponible en version
papier dans la brochure4 De eerste lijn, de leerkrachten wijzen de weg5.
La traduction du dossier Holebi’s est mise en ligne avec l’aimable autorisation de
la rédaction de Klasse.

 Les gays, les lesbiennes et les bisexuel(le)s

Cette contribution ne vise pas à rendre l’homosexualité problématique, tout au
contraire. L’homosexualité est un thème comme un autre. Un professeur ne doit pas être homo pour aborder le sujet en classe. Un professeur de géographie ne doit pas être chinois pour faire cours sur la Chine. Mais peut-être ce thème constitue-t-il le test final pour mesurer l’ouverture d’esprit de votre école.

 Au moins un par classe
Cinq à dix pour cent des êtres humains sont homosexuels, lesbiennes ou
bisexuels. Dans une école de 500 élèves il est donc possible qu’il y ait 50 élèves qui soient gays, lesbiennes ou bisexuel(le)s. Si cette école compte 50
enseignants, cela veut peut-être dire qu’il s’y trouve 5 enseignants LGBT. Les
enquêtes montrent qu’une grande majorité des jeunes (et des enseignants) LGBT ne peuvent pas compter sur beaucoup de sympathie au sein de l’école. Ni de la part des élèves, ni de la part des membres du corps enseignant. Ils sont harcelés, ils sont l’objet de moqueries, ils sont insultés ou même menacés physiquement. Un jeune LGBT sur cinq affirme qu’il ou elle s’est fait insulter par les professeurs. Ils en arrivent parfois à douter d’eux-mêmes ou à se retrouver tout à fait isolés. Les tentatives de suicide des jeunes homosexuels sont deux fois plus fréquentes que la moyenne, chez les jeunes lesbiennes c’est jusqu’à cinq fois plus fréquent. 85 pour cent des jeunes LGBT affirment qu’à l’école, ils n’ont reçu aucune information ou des informations erronées sur l’homosexualité. Dans nombre d’écoles on pense encore que l’homosexualité n’existe pas si on n’aborde pas le sujet.

 Veerle, surveillante-éducatrice

« Pas dans une école technique »
« De toute ma carrière scolaire, je ne m’étais jamais penchée sur le thème de
l’homosexualité. Jusqu’à l’an dernier. Mon fils était à l’époque en dernière année de secondaire. Alors que ses compagnons de classe savouraient pleinement leur dernière année, mon fils devenait de jour en jour plus taiseux et renfermé. Un
soir il a tout avoué : depuis des années il ne savait pas quoi faire avec lui-même
parce qu’il se sentait plus attiré par les garçons que par les filles. Il n’osait en
parler avec personne, même pas avec ses meilleurs amis à l’école. Il avait espéré
que le thème soit abordé pendant les cours d’éducation sexuelle ou à l’occasion
des journées de la relation. Mais non. J’ai trouvé que dans ce domaine son école
ne mettait pas la barre assez haut. Mais après avoir interrogé mes collègues, je
me suis rendu compte que dans mon école non plus on ne soufflait mot sur
l’homosexualité. Les excuses qu’on trouvait pour ne pas aborder le sujet allaient
de « On en sait trop peu sur ce sujet, que vont dire la direction et les
parents ? » à « dans une école technique, on ne va quand même pas s’occuper de
ça. ». Pourtant c’est nécessaire. Depuis que tout le monde sait que je suis « la
mère d’un garçon qui en est », il y a déjà deux élèves qui sont venus me raconter
leur histoire. Et pourtant, à l’école, on trouve encore toujours que ce n’est pas
nécessaire de consacrer du temps à cela. »
Veerle, surveillante-éducatrice

 Quoi ?
IL Y A UN PROBLEME ?

 Plus compliqué que de la géométrie
Les gens aiment bien cataloguer leurs semblables et leur apposer une étiquette claire. Certaines personnes (selon la culture, la classe sociale et la période de l’histoire) vont plus facilement coller une étiquette que d’autres.
 On peut parler d’homosexualité quand un garçon est amoureux d’un autre garçon et le trouve physiquement attirant ou lorsqu’une fille est amoureuse d’une autre fille et la trouve attirante. Celui qui éprouve aussi bien des sentiments homosexuels qu’hétérosexuels et qui les trouve aussi importants les uns que les autres est bisexuel. On désigne les homos, les lesbiennes et les bisexuels par le mot général d’holebi(s). [personnes LGBT].

 si, sur une règle graduée, on place à gauche les personnes qui éprouvent
uniquement des sentiments hétérosexuels et qui ont uniquement des
comportements hétérosexuels et à droite les personnes qui éprouvent
uniquement des sentiments homosexuels et ont uniquement des comportements
homosexuels, il y a encore un grand nombre de personnes que l’on pourra situer
entre ces deux extrêmes. On ne peut pas si aisément mesurer sentiments et
comportements. La sexualité est nettement plus compliquée que la géométrie.
Certaines personnes ont les cheveux noirs ou blonds, d’autres ont les cheveux
roux. Cela ne fait pas de ces derniers des êtres totalement différents. De la
même manière les homos sont des êtres tout aussi ordinaires que les hétéros. La grande différence c’est qu’il y a moins d’holebis, de la même manière qu’il y a moins de personnes aux cheveux roux que de personnes aux cheveux noirs. C’est culturellement que les êtres humains peuvent promouvoir ou annihiler la diversité. Que fait-on dans votre école ?

 Qui ?
 Un sur dix
Cinq à dix pour cent de la population est LGBT. L’homosexualité est présente
dans quasi toutes les cultures et à toutes les époques de l’histoire, dans toutes
les classes de la société. Les personnes LGBT ne sont pas des extraterrestres.
Elles ne vivent pas dans un autre pays. Elles vont par exemple tout simplement à
l’école pour y donner ou pour y suivre les cours.

 La cause ?
 Sans importance !
Que l’homosexualité soit innée (héréditaire) ou acquise (par influence de
l’environnement) est peu important. Dans les deux cas, il s’agit d’une donnée à
laquelle on ne peut rien changer. La question de la cause de l’homosexualité perd
tout intérêt à partir du moment où l’on prend conscience du fait qu’il ne s’agit pas
d’une maladie.

 Les préjugés

 Pour cause d’aversion.
Les homos se comportent de manière efféminée. Les lesbiennes manquent
d’élégance et ne sont pas soignées. Les danseurs de ballet, les infirmiers et les
coiffeurs sont homos. Les lesbiennes détestent les hommes et les homos
détestent les femmes. Les relations homosexuelles ne durent jamais longtemps.
Les personnes LGBT n’ont pas d’intérêt pour les enfants…
En général ces clichés ne sont pas vrais. Certains de ces mythes sont nés de
l’aversion vis-à-vis de l’homosexualité. Ils ne disparaîtront que lorsque la
discrimination disparaîtra.

 La discrimination

 Par l’incompréhension
Les personnes qui sont différentes, nous les approchons et les traitons souvent
de manière différente. Et c’est aussi ce que font les élèves à l’école. C’est parce
que nous considérons la vie en communauté avec un regard d’hétérosexuel que les
personnes LGBT sont souvent discriminées. Souvent les personnes LGBT sont
reléguées au second rang en raison de leur nature par leurs employeurs, par leurs
parents, leurs propriétaires, leurs éducateurs, leurs collègues, les forces de
l’ordre, leurs professeurs… Pour cette raison, beaucoup de personnes LGBT
dissimulent leur nature et la répriment.

L’homosexualité à l’école

Toute forme de discrimination (personnes défavorisées, roux, immigrants,
handicapés, élèves présentant des troubles d’apprentissage) est une injustice.
L’égalité des chances doit être une réalité pour les personnes LGBT tant dans la
vie en société qu’à l’école. L’école fondamentale comme l’école secondaire ont
 une responsabilité sociale. L’école ne peut agir comme si elle n’était pas
concernée par les questions de société. Votre école mène-t-elle une politique
d’émancipation et combat-elle les discriminations ? Ou laisse-t-elle la
situation telle qu’elle est et l’ignore-t-elle ? Certaines écoles affirment que ce
n’est pas leur tâche de jouer un rôle pionnier. Pourtant, il faut défendre l’idée
que l’école doit jouer un rôle actif.
 une responsabilité pédagogique. L’école doit autant que possible écarter les
obstacles que rencontrent les élèves dans l’apprentissage. Pour la plupart des
élèves LGBT, l’angoisse face à l’homosexualité ou la haine de l’homosexualité
(l’homophobie) constitue un obstacle important dans l’apprentissage. C’est
pourquoi une stratégie pour s’attaquer à l’hostilité anti-homosexuelle doit
faire partie du projet pédagogique de l’école.

Les écoles peuvent aider les jeunes gays et lesbiennes à accepter leur
homosexualité et à se construire une image de soi positive. Les élèves
hétérosexuels sont aussi en droit de recevoir une information correcte et
positive à propos de l’homosexualité. C’est ainsi que disparaîtront les
nombreux préjugés qui courent dans les groupes d’élèves hétérosexuels.

 L’APPROCHE
AU NIVEAU INDIVIDUEL

L’identité homosexuelle en cinq étapes
Notre culture considère tout un chacun comme hétérosexuel jusqu’à ce que le
contraire soit démontré. Partant, un processus de développement spécifique voit
le jour qui entraîne un grand nombre de problèmes et des tâches particulières
pour l’école.

 Etape 1 : le trouble de l’identité : le jeune fait l’expérience de quelque chose
(une fantaisie, une excitation, parfois déjà un émoi amoureux) qui fait penser
à l’homosexualité. Cela ne correspond pas à ses attentes et il ne se sent pas
sûr de lui. En outre il sait que c’est un sujet dont on ne parle pas, que « ce
n’est pas bien ». Le trouble et l’incertitude sont souvent couplés à une estime
de soi négative et à de l’angoisse. Cette phase intervient au moment de
l’adolescence pubertaire.

 Etape 2 : le rapprochement identitaire : le jeune se demande ce que cela
signifie d’être homosexuel ? Comment peut-on vivre cela ? Qu’est-ce que cela
a pour conséquences ? Il va se mettre en recherche d’informations. Le doute
refait régulièrement surface. C’est précisément à cause du manque
d’ouverture au sujet de l’homosexualité que l’information est difficile à
trouver. Parfois, le fait même de chercher l’information est source de
grandes angoisses. Les jeunes manquent de modèles auxquels ils peuvent
s’identifier. Souvent cette phase est couplée avec un retrait vis-à-vis des
autres, un isolement. Le jeune est souvent irritable (il doit solutionner ses
problèmes tout seul) et parfois ses résultats scolaires s’en ressentent.

 Etape 3 : la tolérance identitaire : le jeune admet son homosexualité, mais ne
l’approuve pas encore. Parfois, le pas vers la reconnaissance est encore trop
difficile à faire et le jeune passe par une étape intermédiaire : il se considère
comme bisexuel et ne reconnaîtra son homosexualité que plus tard.

 Etape 4 : l’acceptation identitaire : la période la plus difficile est dépassée.
Pour la plupart des jeunes, cette étape (et certainement l’étape suivante) a
lieu une fois l’enseignement secondaire achevé. L’acceptation identitaire va
souvent de pair avec la mise en place d’une fausse identité pour le monde
extérieur. L’option d’une double vie demande beaucoup d’énergie et entraîne
des grandes frustrations. Et se dévoiler au monde extérieur demande
beaucoup d’audace et d’énergie.

 Etape 5 : le coming-out, la manifestation de l’identité : le jeune arrête de se
cacher. En classe ou au travail, il peut à présent à nouveau se consacrer à ses
études ou à son travail et reparler normalement avec ses compagnons de
classe ou ses collègues de travail. Il n’a plus besoin de se tenir sur ses gardes
pour ne pas se trahir.
(Ce plan en cinq étapes est basé sur des enquêtes auprès de garçons. Il est
possible que le développement des jeunes lesbiennes se déroule autrement.
Chacun doit trouver la voie qui lui est propre, et cela dépend de la
personnalité, de l’entourage et des expériences personnelles.)

 Un/e élève qui veut construire une vie homosexuelle doit donc accomplir
un certain nombre de tâches :

 Tâche 1  : donner du sens aux expériences et aux sentiments homosexuels.

 Tâche 2 : garder une image de soi positive. Il doit faire face aux préjugés,
surmonter le sentiment d’isolement, combattre son sentiment de culpabilité.
Il lui faudra souvent mettre en question les normes et les valeurs qui lui
viennent de son éducation et les écarter.

 Tâche 3  : se construire un style de vie comme homosexuel(le).

 Tâche 4 : apprendre comment se débrouiller avec l’homophobie de son
entourage et avec le stress qui en résulte.

  Première aide que peut apporter l’enseignant(e)

 Que faire lorsqu’un élève vient vous raconter qu’elle ou il est
homosexuel(le) ?

1. Ne réagissez pas par le rejet, écoutez et faites clairement comprendre à
l’élève que d’une manière ou d’une autre il peut s’en sortir. Et qu’il peut
compter sur votre discrétion. Un enseignant qui ne se sentirait pas
capable d’aborder le problème positivement doit orienter l’élève vers un
autre collègue ou vers une autre instance (le CPMS ou un groupe local de
jeunes gays et lesbiennes). Soyez prudents en réorientant. Il est en effet
possible que l’élève n’ose pas faire le pas suivant.

2. Prenez le temps de vous faire une idée des problèmes. A quelle étape du
processus d’identification l’élève se trouve-t-il ? Reconnaissez vos limites
et prenez conseil en temps opportun auprès du CPMS ou orientez l’élève
vers les spécialistes.

3. Examinez les solutions possibles. Quelle peut être la contribution du
corps enseignant et vers quel endroit vaut-il mieux réorienter l’élève ?
Des modèles d’identification peuvent jouer un rôle important : d’autres
jeunes gays et/ou lesbiennes, mais peut-être aussi un(e) enseignant(e)
LGBT.

4. Evitez un coming-out forcé dans la classe (sous la pression des
compagnons de classe ou de l’enseignant lui-même). N’empêchez pas le
coming-out, mais veillez à ce qu’il se produise dans une ambiance positive.
Veillez aussi à ce qu’après un tel coming-out, l’accueil individuel en dehors
de la classe se déroule de manière optimale.

5. Impliquer les parents n’est raisonnable que si l’élève marque lui-même son
accord. Les groupes de « parents d’enfants homosexuels » peuvent
apporter leur aide (on peut demander des adresses)

6. Parce que les gays et les lesbiennes ne sont pas acceptés dans la société,
on peut parfois s’attendre à la situation inverse : il se peut qu’un élève
LGBT fasse semblant en classe de ne pas être intéressé par le sujet pour
prévenir tout soupçon. Soyez vigilants.

7 par exemple via le service social de Tels Quels, voir www.telsquels.be, ou par la Rainbowhouse, voir http://www.rainbowhouse.be/fr/index.htm. (Note du traducteur).

L’approche de l’homosexualité en milieu scolaire exige une politique d’école claire.

C’est seulement alors :
 que les initiatives individuelles des enseignants ne resteront pas isolées
 que l’équipe des enseignants travaillera dans la même direction
 que les professeurs pourront s’entraider, se communiquer leurs
expériences, coordonner leurs initiatives.

 Un plan d’action

 1. Motiver. Tous à l’école sont persuadés qu’il est raisonnable et nécessaire
de mettre en place une politique globale contre le harcèlement, les
drogues et la violence . Est-ce que cela vaut aussi pour l’homosexualité ?

 2. S’attaquer à l’homophobie. Que savent la direction et les enseignants de
l’homosexualité ? Faites un tour d’horizon des préjugés et des résistances
chez les différents acteurs de l’école (la direction, les enseignants, les
élèves, les parents). Mettez un plan d’action au point avec des spécialistes
pour évincer les résistances. N’oubliez surtout pas les parents. Les
enfants réagissent souvent négativement à cause de leur environnement :
« Mon père trouve cela dégueulasse ».

 3. Créer un climat d’école bienveillant. Une école qui met sur pied un
accompagnement sérieux des élèves accorde aussi de l’attention aux gays
et aux lesbiennes. Dans le plan d’accompagnement, l’école formule ce
qu’elle va précisément faire, qui sera impliqué et quelle structure l’école
va mettre en place (enseignants de référence, service de médiation, etc.).
Aux valves on peut parmi toutes les autres affiches placer par exemple
une affiche pour une ligne téléphonique d’entraide LGBT ou pour un
groupe de jeunes LGBT. C’est ainsi qu’une école peut montrer qu’elle ne
fait pas un problème de la préférence sexuelle.

 4. Une direction du personnel bienveillante. L’école montre-t-elle le bon
exemple ? Les enseignants gays et lesbiens peuvent-ils dévoiler leur
nature sans que cela prête à conséquence ? Le coming out d’un enseignant
offre un tas de perspectives : il offre aux élèves la possibilité d’ un
modèle auquel s’identifier , il peut entraîner une attitude positive de la
part des élèves, il conduit à plus de tolérance et d’acceptation.

AU NIVEAU DE L’ÉTABLISSEMENT SCOLAIRE

Les professeurs prennent soin du bien-être de tous les élèves de la classe, et
donc aussi les élèves LGBT. Il est également important que les enseignants
fassent des efforts pour déraciner l’homophobie chez les élèves hétérosexuels.
Comment les enseignants peuvent-ils atteindre ce but ?

 1. Une approche intégrée
Ne discriminez pas l’homosexualité quand vous faites cours. Chaque fois
qu’au cours d’une leçon il est question de sexualité ou de formation à la
relation, la question de l’homosexualité peut elle aussi être abordée. Non
comme un cas à part, mais en même temps que la variante hétérosexuelle.
Si par exemple un professeur de français demande à une classe de garçons
de faire la description de la femme idéale, il faut que les élèves gays
puissent aussi décrire leur homme idéal. A l’école primaire, si une leçon se
donne sur le thème de la famille, on peut aussi mentionner des familles
avec deux mamans ou deux papas.

 2. Une approche globale
Un changement d’attitude ne sera possible que si l’approche de
l’homosexualité ne reste pas limitée aux seuls cours de religion ou de
morale. De même que le milieu, la santé, le multiculturalisme, la sexualité
et la relation sont des thèmes pluridisciplinaires, cela vaut aussi pour
l’homosexualité. Dans l’énoncé d’un problème mathématique, il peut aussi
être question de deux hommes qui décident d’aller vivre ensemble. Un
professeur de néerlandais peut placer sur la liste des livres recommandés
un livre qui traite du thème de l’homosexualité. En classe de biologie, on
peut évoquer le comportement homosexuel chez les animaux. En
géographie, l’enseignant(e) peut parler de la formation des ghettos
homosexuels dans les grandes villes américaines.

 3. L’ approche spécifique
L’homosexualité diffère de l’hétérosexualité parce qu’elle n’est pas
acceptée. De là vient la nécessité d’y consacrer des leçons spécifiques :
fournir des informations, réfuter les mythes et les images stéréotypes,
discuter sur les discriminations.

AU NIVEAU DE LA CLASSE

L’attitude des membres du corps enseignant : quelques questions
prioritaires :

 Faites de l’homosexualité un sujet que l’on peut aborder librement de
manière positive. Connaissez vos propres normes, principes et valeurs
(n’admettez pas de blagues stupides sur les homos). Les enseignant(e)s
qui harcèlent les élèves gays et les lesbiennes ouvrent la voie au
harcèlement de ces mêmes élèves par les autres élèves.
 Donnez des informations correctes et combattez les préjugés. Et pour
ce faire, informez-vous suffisamment : les informations partielles
consolident souvent les préjugés. Si vous ne savez pas la réponse à une
question, admettez-le simplement.
 Employez une langue qui corresponde à celle des élèves. Au besoin
n’ignorez pas le langage grossier (« tante, tapette, pédé , jeannette,
gouine, etc. »). Le langage grossier peut être l’occasion d’une bonne
conversation. Sortez le sujet de la sphère du tabou.
 Reconnaissez la manière de voir les choses des élèves et prenez-les au
sérieux. Mais essayez dans le même temps d’élargir leur horizon et de
l’approfondir. Que pensent exactement les élèves ? Pourquoi ? Comment
savent-ils que ce qu’ils avancent est juste ? Pensent-ils que tout le
monde pense comme eux ?
 Essayez d’infléchir les attitudes de rejet. S’il y a une ambiance
homophobe dans le groupe, faites contrepoids, créez un espace pour le
point de vue LGBT. Invitez des personnes LGBT dans la classe.
 Faites prendre conscience des causes sociétales des attitudes de rejet
et situez le combat des gays et des lesbiennes pour l’égalité des droits.
Tous les objectifs ne sont pas faciles à réaliser. Il vous faudra bien sûr tenir
compte de la composition et de l’attitude du groupe. Mettre trop la pression sur
un objectif pour lequel le groupe n’est pas prêt peut être contreproductif. D’un
autre côté, ne sous-estimez cependant ni le rôle d’exemple que jouent les
enseignants ni la bonne volonté et la capacité d’’ouverture au changement des
élèves.

 Gays et lesbiennes à l’école fondamentale ?
Quelques tuyaux

 A l’école fondamentale, il y a souvent suffisamment d’occasions pour évoquer
l’homosexualité : des enfants avec deux papas ou deux mamans, les insultes à
la cour de récréation (« pédé, tapette »), les schémas comportementaux
(« les garçons qui font du ballet sont des pédés »), des gays ou des lesbiennes
connus et médiatisés. Faire le silence sur l’homosexualité ne va pas l’empêcher
de se produire
 Souvent les jeunes enfants n’ont pas encore de préjugés. Les enseignant(e)s
peuvent leur apprendre à se familiariser avec les différences : un enfant avec
des lunettes, un bégayeur, un enfant aux cheveux roux. Les gays et les
lesbiennes sont aussi différents et méritent le respect.
 Expliquez que les personnes LGBT sont des personnes tout à fait normales et
qu’il se fait que ces personnes aiment des personnes du même sexe. Expliquez
aux enfants que plus tard il se peut qu’ils rencontrent des gays et des
lesbiennes à la maison, dans leur famille, leur cercle d’amis ou au travail.
 A l’école fondamentale, il y a aussi des enseignant(e)s homosexuel(le)s. Est-ce
qu’elles ou ils ont l’occasion de se manifester tels qu’elles ou ils sont ?
 Les élèves mûrissent de plus en plus tôt. La plupart des personnes gaies et
lesbiennes ont senti dès l’école primaire que quelque chose d’autre se
produisait en eux/elles. Un professeur qui ne désigne pas le fait d’être
homosexuel comme un problème fait pour eux/elles la différence.
 Il existe pas mal d’outils pédagogiques (jeux, littérature pour la jeunesse) qui permettent d’évoquer l’homosexualité.

Un directeur d’école :
« Je mène une double vie »
« Je trouve très chouette que beaucoup de jeunes enseignant(e)s osent et
puissent manifester au sein de leurs écoles qu’ils/elles sont homosexuel(le)s.
Pour moi c’est hélas impossible. Au sein de mon pouvoir organisateur, il est
impensable de parler librement de mon homosexualité. Aussi suis-je obligé de
mener une double vie et mes relations restent-elles secrètes, cela doit rester à l’écart du domaine public. »

Ciska, 19 ans
Un sur dix, c’est absurde
« Je sais que je suis lesbienne depuis ma cinquième secondaire. Un jour on a parlé
d’amour et de sexualité en classe. Il y avait constamment des débats en classe.
Mais ils concernaient seulement les relations hétérosexuelles. Un jour, il y a eu
un petit chapitre consacré à l’homosexualité. Une leçon très théorique. Pas de
débat, on a dû gratter comme des fous. Je n’oublierai jamais que la prof était
persuadée que le chiffre de « un sur dix » ne pouvait pas être exact, parce
qu’alors cela signifierait qu’il y en avait au moins deux dans la classe et c’était
quand même tout à fait absurde n’est-ce-pas. Je suis restée dans l’ombre et me
suis tue. »

« On ne parle quand même pas de choses comme ça »

Voici une sélection de mentions de discriminations qui sont arrivées à la
Fédération Holebi :

 Suite à des tracasseries, une lesbienne a dû partir de l’école, les professeurs
et la direction n’ont pas réagi aux violences psychiques et physiques qu’on lui a
fait subir.
 Il est interdit à un garçon de voir son ami à l’internat, l’éducateur estime
« qu’il doit avoir des relations avec des filles et qu’il n’y a pas un homo qui
rentrera au foyer (local de réunions) ».
 Avant sa nomination par le P.O., un professeur a dû rendre des comptes à son
pouvoir organisateur sur son engagement dans un groupe local de jeunes gays
et lesbiennes.
 Après le coming out d’un (e)élève, des professeurs ont propagé des préjugés
sur les gays et les lesbiennes.
 Un élève d’une sixième secondaire a reçu un zéro pour une rédaction sur les
événements des vacances dans laquelle il avait rédigé un compte-rendu des
activités d’un groupe de jeunes gays et lesbiennes. Selon la professeure de
néerlandais « on ne peut quand même pas traiter un sujet comme celui-là dans
une rédaction ».
Ce tableau d’affichage est modéré par la rédaction de Klasse.

« Salut. Si un professeur désire inviter quelques jeunes pour témoigner en
classe, c’est possible ! En Flandre il y a un grand nombre de groupes de jeunes
gays et lesbiennes. Vous trouverez leurs coordonnées sur le site
www.weljongniethetero.be [jeune, mais pas hétéro, Ndt]. Je suis moi-même actif
au sein du groupe hasseltois « Inderdaad » [En effet, Ndt]. La semaine passée,
avec deux autres jeunes, nous avons dû témoigner devant une classe de 60
jeunes…ce fut une expérience très très chouette ».
Luk, le 29-11-2004

« Je suis la mère lesbienne d’une petite fille de 8 ans. Elle sait de quoi il
retourne avec sa maman et n’en fait pas un problème. Mais ce fut cependant un
vrai soulagement pour elle lorsqu’elle a entendu que l’ « homme de sa maîtresse
était une femme ». Depuis lors elle parle beaucoup plus librement de ma nature
et elle défend sa maîtresse bec et ongles lorsqu’elle entend que d’autres enfants
ne l’acceptent pas. Je suis extrêmement reconnaissante à sa maîtresse qu’elle ait
fait le grand pas de se montrer ouvertement telle qu’elle est à l’école. Ma
reconnaissance va naturellement aussi à l’école qui l’a soutenue. Cette dame a
ainsi fort aidé des enfants comme ma fille, et certainement celles qui en elles mêmes
commencent à découvrir qu’elles éprouvent tout de même pas mal de
sentiments pour les filles.
Sa maîtresse est très aimée à l’école, et donc le fait d’être lesbienne n’est pas
pour elle synonyme d’isolement social, de double vie, de chagrin… Il est à espérer
que d’autres enseignant(e)s auront l’occasion d’apporter de cette manière leur
contribution au développement des enfants, un développement qui en fait des
jeunes gens heureux de vivre. »
M.L. , 7-11-2004

« Je n’en sais rien, mais d’après moi je suis bi, car je me sens parfois très
attirée par des filles. J’ai 14 ans, et je suis très peu sûre de moi, mais en fait je
ne sais pas du tout, est-ce qu’il y en a d’autres avec ce ‘problème’ ? »
anonyme 6-8-2004

 En août 2005, il y avait 11 courriels publiés, dont certains sont traduits ci-dessous (Ndt)

Tableau d’affichage : le forum de Klasse

« Dans notre école je ne connais qu’un enseignant qui soit homo. Il a dans la
vingtaine et il se débrouille très bien avec les élèves. En général on ne fait pas de
problèmes autour de son homosexualité. Cela devrait être partout comme ça, je
suis sûre qu’il y a encore d’autres enseignant(e)s qui sont homos mais qui n’osent
pas le manifester face aux autres enseignants et aux élèves parce que peut-être
ils ont le sentiment d’être ‘différents’. (…) mais les gays et les lesbiennes sont
plutôt bien acceptés dans notre société, (…) Attendez un peu et vous verrez
qu’un beau jour les gays et les lesbiennes seront sûrement bien acceptés par la
société. »
Evi 21-05-04

« Je trouve ce dossier sur les personnes LGBT extrêmement intéressant et
heureusement notre école est une école très ouverte à ce sujet. Il faut le
souligner : la direction soutient entièrement le fait que cette thématique puisse
être abordée librement, mais la plupart de mes collègues sont si encroûtés dans
leurs vieux schémas éducationnels (et là je ne parle pas seulement au sujet des
collègues plus âgés, parce que ceux-là sont parfois plus souples que les plus
jeunes) que ce n’est pas toujours facile pour la direction de porter le sujet.
Heureusement il y a un cercle de professeurs qui soutiennent toutes les
initiatives. Que puis-je faire pour convaincre mes collègues que ce type de
thématiques est important dans l’éducation, alors qu’ils s’obstinent à prétendre
que les élèves sont là pour apprendre (…) des choses comme les mathématiques,
la physique et la chimie (…) ? ».
M.C. 13-05-04 »