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L’éducation à la tolérance, pourquoi ?

mardi 20 juin 2006, par Andy

D’APRES LA BROCHURE UNESCO : La tolérance, porte ouverte sur la paix ; manuel éducatif à l’usage des communautés et des écoles- version partielle et provisoire, année 1994.

Les sociétés éduquent pour servir des fins socialement constructives. Souvent des fins sont liées à des objectifs ou à des problèmes particuliers. De même que l’éducation relative au développement prépare les citoyens à participer aux processus de développement social, culturel et économique et que l’éducation relative à l’environnement fournit une instruction sur les menaces pesant sur le milieu naturel et encourage les comportements propres à les éviter, le présent guide est conçu dans la perspective d’une éducation à des fins socialement constructives. Il s’adresse à la vaste société que représente notre communauté planétaire naissante, considérée dans toute sa diversité. Le processus social qu’il vise à favoriser est l’édification de la paix par le respect des droits de l’homme et la pratique de la démocratie. Le problème qu’il vise à aborder est l’intolérance, menace d’une extrême gravité pour les droits de l’homme, la démocratie et la paix.

1.1 Une épidémie d’intolérance transforme les communautés et menace les écoles

Au terme de plusieurs décennies de guerre froide, la société mondiale s’est bercée brièvement de l’espoir que la fin de ce combat allait marquer le début d’une ère où il serait possible de s’attaquer aux conséquences destructrices de ce conflit et aux divisions profondes imposées par les injustices économiques dans le monde. Mais cet espoir a été mis à rude épreuve par l’éclatement de conflits régionaux et par les hostilités entre peuples qui ont fragmenté des nations et transformé radicalement l’ordonnance politique du monde telle qu’elle avait été depuis près d’un demi siècle. La planète tout entière a été le théâtre de tensions entre groupes, d’hostilités religieuses et de conflits ethniques. Beaucoup de conflits anciens jusqu’alors négligés ont retenu l’attention du monde. Des haines profondes, dont certaines avaient été déjà apaisées grâce à des réconciliations qui avaient permis à des groupes ethniques différents de coexister dans la paix et la coopération, ont resurgi dans les comportements, ont trouvé leur expression dans les médias et les conférences, et des communautés se sont lancées dans la guerre. Le règlement des différends, la réconciliation des parties en conflit et la reconstruction des sociétés seront l’une des tâches les plus difficiles que la société des hommes ait jamais eues à entreprendre. C’est peut-être le plus grand défi auquel ceux qui cherchent à éduquer pour la paix aient jamais dû faire face. Les éducateurs ne peuvent pas se dérober en présence des réalités de l’histoire ni se soustraire à leur responsabilité de relever le défi que le processus de réconciliation présente à ceux qui préparent et mettent en oeuvre le processus d’apprentissage social.
Ces conflits, de même que les problèmes de la pauvreté qui ont accéléré les taux de migration, ont grossi le nombre des réfugiés demandeurs d’asile et des migrants cherchant du travail dans des pays et des collectivités qui étaient autrefois essentiellement monoculturels. Souvent imprévu, le multiculturalisme a fait son apparition comme un facteur social touchant de nombreuses communautés et faisant sentir son influence sur leurs écoles. Les classes sont devenues des microcosmes de la diversité culturelle de la société mondiale et la compréhension transculturelle est devenue une condition indispensable à l’établissement d’un bon climat d’apprentissage dans les écoles du monde entier. Pour beaucoup d’écoles, ces circonstances nouvelles ont soulevé de grosses difficultés. Certains ont trouvé dans ces difficultés une occasion de dispenser une éducation tendant à un multi­culturalisme harmonieux, conçu comme le pluralisme positif d’une culture de paix. La compréhension transculturelle doit s’apprendre. Et chacune exige elle-même que la tolérance s’apprenne et se pratique. Tel est le sens de l’appel du Directeur général de l’UNESCO.

Les enseignants du système scolaire et les éducateurs du système non formel pourraient utiliser le présent guide comme manuel pour ses méthodes d’enseignement, ses buts et ses directives. Ils pourraient aussi mettre au point eux-mêmes leurs méthodes et leurs matériels dont ils feraient profiter d’autres éducateurs...

1.2 La tolérance fait partie intégrante des droits de l’homme et de la paix

Comme le Directeur général l’UNESCO l’indique, la tolérance fait partie intégrante du respect des droits de l’homme et de l’instauration de la paix, et elle leur est indispensable. Sous sa forme la plus simple et la plus fondamentale, la tolérance consiste à accorder aux autres le droit de voir leur personne et leur identité respectées. Les valeurs politiques et sociales modernes dont sont issues les normes internationales actuelles en matière de droits de l’homme furent d’abord formulées dans un appel à la tolérance en tant que condition essentielle du maintien de l’ordre social. Les penseurs politiques occidentaux mirent en évidence la nécessité de la tolérance pour une société qui ne pouvait plus tolérer l’intolérance et les déchirements des guerres de religion des XVIe et XVIIe siècles. Reconnaître que la tolérance était un facteur fondamental de la paix entre les nations fut un élément important du climat historique qui aboutit aux premières déclarations modernes des droits couronnés trois siècles plus tard parla Déclaration universelle des droits de l’homme. Dans ce texte, les Nations Unies ont défini les caractéristiques de l’ordre mondial pacifique qu’elles appelaient de leurs voeux sous la forme de droits, revendications fondamentales que tous les êtres humains devaient pouvoir présenter à la société.
Il est devenu manifeste qu’une grande partie des dissensions intercommunautaires attisées par l’intolérance est due au fait que les peuples insistent sur leurs droits à régir eux-mêmes leurs affaires politiques, sociales et économiques. Comme le souligne la Déclaration universelle, la violence peut être la conséquence de la répression d’aspirations démocratiques, tout comme elle peut être le résultat de l’intolérance. L’une des fonctions majeures de la démocratie est de faciliter le changement politique et de régler les différends politiques sans violence. L’élément de démocratie s’imbrique donc fondamentalement avec la paix, les droits de l’homme et la tolérance. L’instauration de ces quatre valeurs dans la société mondiale constituerait la base d’une "culture de paix". Toute culture est essentiellement le résultat d’un apprentissage. L’éducation est un apprentissage, préparé et guidé par des valeurs culturelles. Une culture de paix exige donc une éducation préparée et guidée par les valeurs de la paix, des droits de l’homme, de la démocratie et, en son coeur même, de la tolérance. Etant donné l’épidémie d’intolérance qui sévit actuellement, l’éducation pour une culture de paix, en particulier pendant l’Année des Nations Unies pour la tolérance, devrait être axée sur cette valeur fondamentale.


1.3 Qui peut contribuer à l’éducation pour la tolérance

Chaque élément de la communauté peut contribuer à l’éducation pour la tolérance et chaque élément peut prendre part à la célébration de l’Année des Nations Unies pour la tolérance.
Les conseils municipaux pourraient organiser une semaine de manifestations destinées à célébrer les différents groupes composant la communauté et leur apport à la vie commune. Ces manifestations pourraient avoir lieu vers le 16 novembre, jour anniversaire de l’adoption de l’Acte constitutif de l’UNESCO, afin de célébrer l’Année des Nations Unies pour la tolérance et de lancer la décennie des Nations Unies pour l’éducation en matière de droits de l’homme qui a été proposée. Des organisations civiques et des groupes culturels pourraient se charger de certains aspects de la célébration.
Les églises, les temples. les mosquées, les synagogues et les organisations religieuses pourraient organiser des programmes sur la tolérance religieuse, prendre part à des dialogues inter religieux et élaborer des directives pour l’enseignement du respect mutuel des religions dans les écoles de la communauté.
Les autorités scolaires pourraient proposer le présent guide aux associations de parents d’élèves en sollicitant leurs suggestions sur la manière dont les directives et les orientations pourraient être adaptées à la situation locale.
Les parents et les membres d’organisations locales ayant une expérience ou une connaissance particulière de l’intolérance, de ce en quoi elle consiste et de la façon d’y faire face, ou qui oeuvrent en faveur des droits de l’homme, pourraient se porter volontaires pour faire connaître l’expérience qu’ils ont ainsi acquise dans des assemblées scolaires ou dans les classes.
Les animateurs communautaires et les travailleurs sociaux pourraient établir des programmes d’action pour évaluer et aborder les problèmes d’intolérance rencontrés dans leur localité et dans la population qu’ils desservent.
Les églises et les écoles pourraient accueillir des activités tendant à aborder les questions locales et les problèmes d’intolérance qui se posent dans la communauté et à y rechercher des solutions. L’assistance et la solidarité dont les victimes de l’intolérance bénéficieraient de la part des parents et de la communauté seraient sans doute la leçon de tolérance la plus efficace que les jeunes pourraient recevoir.
Les formateurs d’enseignants, tant pour la formation préalable que pour la formation en cours d’emploi, et notamment ceux qui donnent des cours sur les fondements philosophiques ou sociaux de l’éducation, pourraient faire usage du présent guide pour compléter leur enseignement et familiariser les étudiants et les enseignants en service avec l’idée de tolérance considérée comme une valeur sociale essentielle et un objectif d’apprentissage important pour l’éducation sociale.

1.4 Pour étude et discussion : l’idée d’un monde de tolérance

Les enseignants, les groupes d’enseignants dans les écoles, les membres du clergé, les groupes d’étude ou les coordonnateurs d’organisations désireux de lancer un programme d’apprentissage sur la tolérance sont autorisés à reproduire tout ou partie du présent guide comme base d’étude et de discussions. Les questions ci-après ainsi que celles qui figurent dans d’autres chapitres sont destinées à orienter la discussion pour cette étude. Ces questions conviennent à des adultes et à des élèves du deuxième cycle de l’enseignement secondaire.
* Quel type de société pourrions-nous avoir Si nous réalisions une culture de paix ? Comment cette culture pourrait elle se manifester dans nos vies familiales, dans nos communautés, dans la politique de notre pays et dans les relations internationales ?
* Quel rapport y a-t-il selon vous entre la tolérance et la paix ? Les droits de l’homme pourraient ils devenir une réalité en l’absence d’un engagement de la société en faveur de la tolérance ? Y-a-t-il à votre avis un rapport significatif entre les droits de l’homme et la démocratie ?
* Quelles sont vos préoccupations personnelles et celles de votre communauté cil ce qui concerne la question de la tolérance ? En quoi ces préoccupations se rattachent-elles au problème de la tolérance à l’échelle planétaire ? Pouvez-vous établir des rapports entre vos préoccupations personnelles et l’instauration de la paix dans le monde ?

Vers une culture de paix. diagnostic de l’intolérance, description de la tolérance

La tolérance n’est pas une fin mais un moyen. C’est la qualité essentielle minimale de relations sociales qui refusent la violence et la contrainte. Sans tolérance, il ne peut y avoir de paix. Avec la tolérance, toute une série de possibilités humaines et sociales positives peuvent être recherchées, dont l’instauration d’une culture de paix.

2. L’intolérance et le cycle de la violence

Il y a intolérance lorsqu’un groupe se considère lui­même ou considère ses croyances ou son mode de vie comme supérieur aux autres. Elle peut entraîner toute une gamme de conséquences, depuis le simple manque de courtoisie ou l’ignorance d’autrui jusqu’à des systèmes sociaux élaborés comme celui de l’apartheid ou jusqu’à l’anéantissement délibéré d’un peuple par un génocide. Tous ces actes ont pour origine le refus de la personne humaine. Par conséquent, l’objectif primordial de l’éducation pour la tolérance est de reconnaître et de respecter la dignité et l’intégrité de tous les êtres humains. Cette valeur est au coeur même de toutes les théories et normes internationales relatives aux droits de l’homme. Elle est la motivation principale des efforts visant à instaurer la paix, la source d’inspiration des formes démocratiques de gouvernement ; et l’antithèse de l’intolérance.
L’intolérance est un symptôme qui porte en soi les germes d’un mal social destructeur de vie, la violence. La violence est une pathologie qui exige la mobilisation de tous les efforts possibles pour protéger la santé et le bien-être de la société. La "médecine préventive" sous la forme d’une éducation permanente pour la paix, les droits de l’homme et la démocratie est le remède le plus efficace, mais il faut aussi déployer des efforts pour réagir efficacement dès les premiers symptômes. Les décideurs, les éducateurs et, à vrai dire, tous les citoyens doivent pouvoir reconnaître ces symptômes ou les indicateurs de l’intolérance et agir en conséquence.

2.2 Les symptômes de l’intolérance : principes généraux d’un enseignement relatif à des cas spécifiques

Quel que soit celui qui s’apprête à dispenser une éducation pour la tolérance, qu’il s’agisse d’une organisation communautaire, d’un système scolaire ou d’un enseignant isolé, il devra évaluer et prendre en compte le degré et la nature de l’intolérance qui peut exister dans le milieu considéré. Des indicateurs ou "symptômes" de l’intolérance peuvent servir d’instruments d’évaluation et de base pour un enseignement sur la tolérance. Les symptômes définis ci-après sont classés dans une certaine mesure par ordre de gravité, mais ils ne représentent pas une progression. On peut à un moment donné en rencontrer un seul, ou plusieurs, ou même tous à la fois. Chacun d’entre eux, à mesure qu’il apparaît, sert d’avertissement, indiquant que d’autres symptômes risquent d’être présents ou vont vraisemblablement suivre.
Si ces symptômes existent dans une communauté, ils existent probablement dans les écoles. Les enseignants devraient être en alerte et les guetter dans leur classe. Si les enfants manifestent ces symptômes dans leurs attitudes et leurs comportements en classe ou dans la cour de récréation, les enseignants devraient en prendre note, mais rester prudents au début avant de réagir. Les enfants, surtout les plus jeunes, copient parfois des attitudes qu’ils ont observées dans leur milieu familial et/ou dans l’ensemble de la communauté. Il est rare qu’ils soient à l’origine de préjugés ou d’attitudes et de comportements déshumanisants. Lorsqu’un comportement constitue une violation flagrante de droits, on peut y porter directement remède mais, même dans ce cas, il est important de s’abstenir de sermonner et de moraliser ; il vaut mieux essayer d’expliquer et d’inciter à réfléchir sur les conséquences du symptôme. Quand on enseigne comment reconnaître l’intolérance, il est utile de commencer par des descriptions générales et des exemples différents de ceux qu’on peut observer dans la communauté où l’enseignement est donné. Ensuite, en discutant et en procédant par tâtonnement, l’enseignant peut acheminer les élèves vers les éléments d’intolérance qui ont un rapport direct avec leur propre existence. Lorsqu’il est très bien fait, un tel enseignement permet aux élèves de découvrir et d"’identifier" plus facilement ces cas d’intolérance. Il faut toujours aider les élèves à comprendre les concepts généraux définis dans les indicateurs qui suivent, ainsi que les exemples particuliers, et leur fournir des informations sur d’autres exemples du même concept. Il est important que les élèves comprennent que l’intolérance est un problème commun à de nombreuses sociétés, un problème mondial et que, en s’attaquant aux symptômes qui se manifestent dans leur école et leur communauté, ils peuvent contribuer à atténuer la gravité d’un problème planétaire, acquérant ainsi des connaissances qui leur seront utiles, à eux-mêmes et à la société dans laquelle ils vivent, pendant de nombreuses années.
Tout éducateur le reconnaîtra aisément, certains de ces symptômes apparaissent dans tous les groupes et milieux où l’intolérance peut surgir. Des variantes de ces comportements se rencontrent dans les écoles depuis les plus petites classes jusqu’aux années terminales et même à l’université, et aussi dans les t entreprises, dans d’autres institutions et dans la société en général. Pour introduire l’étude de la tolérance, les éducateurs pourraient commencer par des nouvelles qu’ils auront recueillies dans les journaux ou qui auront été choisies par les élèves ou le membres du groupe. Il faut essayer de décrire divers incidents spécifiques pour bien mettre en lumière les éléments comportement constitutifs de l’intolérance. Comme on l’a indiqué, l’enseignement peut commencer par des exemples relativement éloignés pour en venir à des "histoires" racontées et à l’exposé par les apprenants d’expériences qu’ils ont faites eux-mêmes et des cas d’intolérance qu’ils ont observés dans leur groupe, leur l’intolérance, il convient de déterminer comment y remédier, mais le mieux est d’avoir quelques indicateurs de la tolérance pour que les mesures à prendre ne visent pas seulement à éliminer l’intolérance, mais incitent surtout à développer la tolérance.


2.3- Pour étude et discussion : une cartographie de l’intolérance

Commencez votre étude en passant en revue la situation de l’intolérance dans le monde. Si votre classe ou votre groupe d’étude se réunit régulièrement au même endroit, accrochez au mur un grand planisphère sur lequel vous porterez en
utilisant des couleurs ou des repères pour signaler les mêmes types d’intolérance dans différentes régions du monde) les données suivantes :
1. Guerres et conflits armés en cours entre groupes ethniques et/ou communautés linguistiques.
2. Conflits entre groupes de confessions différentes pouvant appartenir à la même ethnie ou "race".
3.Conflits raciaux et/ou répression et ségrégation.
4.Conflits entre une ou plusieurs minorités et la majorité, qu’il s’agisse d’un parti politique, d’un groupe ethnique ou d’une religion.
5.Incidents ou actes de violence à l’encontre des femmes ou oppression fondée sur le sexe.
6.Cas d’exploitation systématique des enfants et/ou de sévices infligés aux enfants.
Installez un panneau d’affichage avec des photographies et des articles de revues et de journaux rendant compte de cas et d’incidents d’intolérance. Choisissez un conflit intercommunautaire ou un exemple frappant d’intolérance pour chacune des régions du monde ci-après Afrique, Asie, Pacifique, Amérique du Sud, Amérique centrale et Caraïbes, Amérique du Nord et Europe. Réunissez le plus d’informations possible sur les cas que vous aurez choisis. Répartissez le travail de lecture et de présentation des informations entre les élèves de la classe ou les membres du groupe.
* Distribuez à chacun un exemplaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
A propos de chaque cas, débattez des sujets suivants :
 Quels sont les groupes en cause ?
 Quelles sont les preuves de l’intolérance ? Envisagez à la fois les symptômes généraux ou indicateurs de l’intolérance et les événements et circonstances spécifiques montrant que le symptôme existe. Prenez en considération les dates, le nombre des personnes concernées, le préjudice exact qui a été infligé et les droits de l’homme qui ont été violés.
De quelles questions s’agit-il ? Comment chacun des groupes concernés décrirait-il ce qui est en jeu et quels sont ses objectifs et ses buts ? Pourriez-vous ou les parties en présence pourraient elles soutenir que le préjudice est différent des violations des droits de l’homme qui ont co lieu ou qu’il s’y ajoute ? Décrivez ce préjudice
 Quelles sont les causes des événements et incidents ; sont-elles récentes ou anciennes ? Qu’est-ce que chaque partie pourrait qualifier d"’intolérable" chez l’autre ?
 Quels espoirs avez-vous de voir le conflit se régler ? Développement de la tolérance chez les parties en conflit et entre celles-ci ? Qu’est-ce qui doit être fait pour remédier vraiment à l’intolérance et pour que les parties se réconcilient ? Qui peut opérer cette transformation ?
* Etablissez une liste des situations et problèmes autres que l’intolérance entre groupes existant dans le monde et que vous estimez intolérables. Ces situations peuvent-elles être considérées comme des violations des droits de l’homme ? Pensez-vous que les nonnes actuelles en matière de droits de l’ homme devraient être élargies pour que soit créée une société mondiale vraiment tolérante ?

2.4 Guetter les signes d’espoir : les conditions de la tolérance

Etant donné que les conditions propices à la tolérance ne sautent pas aux yeux, il faut que nous ayons certains moyens de reconnaître et d’encourager la pratique de la tolérance. Là encore, il existe quelques indicateurs qui peuvent servir à la fois d’outils d’évaluation et de base pour définir les objectifs d’un apprentissage de la tolérance. Si les conditions de tolérance indiquées ne sont pas réunies dans votre classe, votre école ou votre communauté, les éducateurs et les dirigeants de la communauté pourraient prendre l’initiative de mesures destinées à intégrer une action éducative tendant à les créer dans les directives que doivent suivre les autorités et dans les programmes éducatifs.

Quelques signes encourageants de tolérance et les indicateurs sociaux correspondants :

Langue : Absence d’apostrophes raciales ethniques et sexistes. Les médias et les publications utilisent un langage neutre en ce qui concerne les sexes et évitent d’utiliser, pour décrire les événements et les personnes, les adjectifs et les verbes impliquant un préjugé. Les langues des minorités sont employées dans l’enseignement et les médias.
Ordre public : Caractérisé par l’égalité entre les personnes, c’est-à-dire l’égalité d’accès aux avantages sociaux, aux activités publiques et aux possibilités éducatives et économiques pour tous les groupes, raciaux, ethniques, religieux, pour les hommes et les femmes, pour les jeunes et les vieux, pour toutes les classes sociales, etc.
Relations sociales : Fondées sur le respect mutuel de la dignité humaine chez tous les membres de la société.
Processus politique : Essentiellement démocratique avec des chances égales de participation pour les minorités, les hommes et les femmes.
Relations majorité-minorité et populations autochtones : La société ou le groupe considéré (école, entreprise, etc.) fournit délibérément un cadre permettant des échanges au sein des groupes majoritaires et minoritaires ainsi qu’entre ces groupes ; veille à la sauvegarde de l’intégrité culturelle des minorités et de leurs langues dont l’utilisation est encouragée ; la dignité humaine et tous les droits des personnes appartenant à des minorités ou à des populations autochtones sont respectés.
Manifestations communautaires, commémorations historiques, etc. : Tous les intéressés concourent à la préparation de ces manifestations et y participent. On tient compte de la sensibilité de tous pour la célébration d’événements historiques, de fêtes nationales, etc.
Manifestations culturelles : Toutes les cultures que compte la société ont la possibilité de célébrer leurs traditions et sont représentées à toutes les manifestations culturelles nationales et communautaires.
Pratiques religieuses : Chacun est libre de pratiquer sa religion à condition de respecter les droits et l’intégrité d’autrui. Nul n’est tenu de participer contre son gré à des cérémonies religieuses.
Coopération entre groupes : Tous les groupes font leurs les préoccupations communes à la collectivité tout entière. Tous les groupes coopèrent à la recherche de solutions aux problèmes et aux controverses de la vie publique tout comme à la réalisation des objectifs sociaux communs. Les dialogues inter ethniques et inter religieux sur les problèmes communs et les relations entre groupes font donc partie intégrante du discours communautaire.

2.5 Pour étude et discussion : comment évaluer nos communautés et nos pays ?

On trouve probablement aujourd’hui dans la plupart des communautés à la fois des symptômes des problèmes et des signes d’espoir. Organisez dans votre classe ou dans votre groupe, un débat sur les sujets et questions ci-après pour voir où votre communauté et votre pays en sont en matière de tolérance.
* Donnez des exemples de signes de tolérance que vous avez observés dans votre école, votre organisation et/ou votre communauté. Quels sont les avantages qui en découlent ? Que pourrait-on faire pour augmenter le nombre et l’importance de tous ces signes de tolérance ? Est-ce que vous pouvez ou est-ce que votre classe, votre organisation ou votre communauté peut agir dans ce sens ?
* Quels symptômes particuliers d’intolérance avez-vous personnellement observés ou expérimentés ? Décrivez les événements et les circonstances. Quelles ont été les réactions du public, de ceux qui ont subi les actes d’intolérance et de ceux qui les ont commis ? Pensez-vous que ces réactions ont contribué à "guérir" la maladie de l’intolérance ou qu’elles en ont aggravé les effets ? Quelles autres réactions pouvez-vous imaginer ? Comment les indicateurs de la tolérance pourraient-ils servir à faciliter le choix de ces réactions ? Quels résultats peut-on attendre des autres réactions possibles ?
* Est-ce que votre école, votre organisation, votre communauté ou votre pays a des normes ou des directives pour accroître la tolérance ? Dans l’affirmative, est-ce que l’une de ces entités essaie d’encourager les comportements et pratiques figurant ici parmi les signes de tolérance ? Y a-t-il d’autres directives ou comportements plus efficaces ? Sont-ils appliqués et évalués ? Quelles autres mesures pourrait-on prendre pour réduire l’intolérance et instaurer la tolérance dans vos écoles et vos communautés ?

2.6 Droits de l’homme : les limites de la tolérance : retenue et responsabilité

La tolérance est perçue comme une abstraction. Elle est décrite en général comme une attitude ou comme une condition sociale. Cependant, aucune de ces définitions ne saurait s’appliquer en l’absence de l’autre La tolérance en tant que condition sociale est tributaire de la tolérance en tant qu’attitude largement répandue dans la société Si la tolérance est une condition recherchée ou appréciée par une société, l’attitude sera également appréciée et considérée comme une qualité socialement souhaitable Par conséquent, comme pour toutes les qualités socialement souhaitables la société éduquera ses membres pour qu’ ils apprécient et adoptent l’attitude. Même avec l’aide d’indicateurs sociaux, la tolérance est abstraite et difficile à mesurer et à observer. L’intolérance est facile à voir, surtout lorsqu’elle entraîne la violation de droits de l’homme. Nous pouvons évaluer aisément les conséquences de l’intolérance puisque celle-ci envenime les rapports humains, provoque toutes sortes de discriminations sociales extrêmement néfastes et aboutit à des conflits violents, souvent meurtriers. Il n’en va pas de même de la tolérance car celle-ci, dans ses formes fondamentales, n’exige pas seulement les conditions observables décrites à la précédente section et des mesures expressément destinées à les faire prévaloir ; elle exige aussi qu’on s’abstienne et qu’on se retienne pour éviter les conséquences humainement désastreuses de l’intolérance qui se manifestent à la fois dans les comportements individuels et dans l’attitude des pouvoirs publics. La tolérance est au coeur même des responsabilités qui incombent à une société pluraliste. Ce sont les principes et les normes des droits de l’homme régissant les formes et les finalités de la responsabilité sociale qui déterminent les situations qui sont intolérables et les comportements qui doivent être réfrénés.
La tolérance peut être envisagée à la fois d’un point de vue négatif et d’un point de vue positif. L’un de ses aspects est qu’elle est l’antidote de l’intolérance. Les réactions de négation, d’agression ou d’exclusion doivent être réprimées chez les individus et dans les sociétés. Certes, en vertu du principe de tolérance, c’est aux individus et à la société qu’il incombe de s’abstenir de ces comportements. Les normes et les lois en matière de droits de l’homme énoncent certains de ces interdits en spécifiant ce que les gouvernements ne peuvent faire aux citoyens et ce que les citoyens doivent s’abstenir de faire à leurs concitoyens. Cette
retenue constitue le niveau minimal de respect pour autrui au-dessous duquel tout individu et toute société, tombent dans l’intolérance et dans la violation des droits de l’homme.
Considérée d’un point de vue positif, la tolérance veut qu’on agisse avec le sens des responsabilités pour créer les conditions de la tolérance qui sont indispensables aux droits de l’homme et à la paix. Dans le domaine de l’éducation, elle veut que soient cultivées des attitudes d’ouverture, d’intérêt véritable pour la différence et de respect pour la diversité, que soient semés les germes d’une aptitude à reconnaître l’injustice, que soient prises des mesures pour combattre celle-ci, que les différends soient réglés de façon constructive et qu’on passe des situations de conflit à la réconciliation et à la reconstruction sociale.

2.7 Les manifestations sociales d’intolérance qui violent les droits de l’homme

Qu’il y ait des cas où l’intolérance peut être considérée comme une violation des droits de l’homme apparaît dans certaines des grandes formes d’intolérance contre lesquelles se sont élevés les mouvements de défense des droits de l’homme, les normes internationales et l’éducation pour la tolérance. Parmi ces formes graves d’intolérance, il convient de mentionner :

Le sexisme : Politiques et comportements excluant les femmes d’une participation pleine et entière à la vie de la société et de la jouissance de tous les droits de la personne humaine ; reposant sur le postulat selon lequel les hommes seraient humainement
supérieurs aux femmes.
Le racisme : Déni des droits de l’homme fondé sur la race, justifié par l’affirmation selon laquelle certains groupes raciaux seraient supérieurs à d’autres.
L’ethnocentrisme : Exclusion sur la base de la culture ou de la langue, fondée sur l’idée qu’il y aurait des niveaux différents de valeur et d’avancement entre les cultures.
L’antisémitisme : Attitudes et comportements fondés sur des préjugés, discrimination et persécutions perpétrées contre les juifs.
Le nationalisme : Croyance selon laquelle une nation est supérieure et a des droits sur les autres.
Le fascisme : Croyance selon laquelle l’État ne doit tolérer ni dissidence ni diversité et est habilité à exercer un contrôle sur la vie des citoyens.
La xénophobie : Peur et aversion à l’égard des étrangers et de ceux qui appartiennent à d’autres cultures ; croyance selon laquelle "ceux de l’extérieur" porteront préjudice à la société.
L’impérialisme : Asservissement d’un ou de plusieurs peuples par un autre pour prendre possession des richesses et des ressources du peuple asservi.
L’exploitation : Utilisation du temps et du travail de personnes sans rémunération équitable ; utilisation imprudente et gaspillage des ressources et du milieu naturels.
La répression religieuse : Imposition d’une religion donnée ou de ses valeurs et pratiques et octroi d’un traitement de faveur aux adeptes de cette religion en vertu de l’idée selon laquelle la religion en question serait la seule interprétation authentique de la vérité religieuse ou spirituelle.


2.8 Pour étude et discussion : comment utiliser les droits de l’homme pour diagnostiquer l’intolérance

Tous les membres du groupe ou de la classe devront lire et étudier la Déclaration.universelle des droits de l’homme, puis débattre ensemble des sujets en questions ci-après :
* Quels conflits entre groupes ethniques et religieux pourraient ils être évités ou réglés par le respect des droits de l’homme ? Quels droits en particulier ?
* Quels sont parmi les droits énoncés dans la Déclaration ceux qui exigent qu’on évite certains comportements et certaines situations et quels sont ceux qui exigent l’exercice actif de responsabilités ?
* Passer en revue les situations sociales d’intolérance qui violent des droits de l’homme et suggérer des réactions impliquant la retenue et le sens des responsabilités. A quoi faut-il mettre fin ? Que
* Indiquer sur la carte mondiale de l’intolérable les lieux où l’on peut observer dans la société des manifestations et des croyances en faveur de l’intolérance. Décrire les faits observés et leurs conséquences sur le plan humain. Quels sont les mouvements qui luttent contre ces manifestations d’intolérance ? Sont-ils uniformément tolérés partout où l’intolérance prévaut ? Quels sont les moyens appropriés de réagir à ces manifestations ?

L’enseignement de la tolérance, quelques problèmes et quelques possibilités

(...) La plupart des programmes actuels d’éducation pour la tolérance s’inspirent de problèmes que connaissent des sociétés en voie de mutation rapide. Les communautés sont en présence de problèmes posés par les relations entre des groupes qui n’avaient jusqu’alors jamais ou presque jamais été en contacts. Ces relations débutent dans un contexte d’ignorance culturelle, chacun ne connaissant pas grand-chose ou rien du tout sur l’autre, avec des tensions économiques auxquelles les ressources de la communauté ne permettent pas de faire face et avec l’aggravation du chômage, la pénurie de logements et d’équipements collectifs. Trop souvent, ces situations sont exacerbées par des préjugés raciaux, religieux et ethniques, par tout un passé d’hostilité entre certains groupes et par le réveil d’un chauvinisme poussant à l’exclusion. L’intolérance religieuse, qu’elle soit un vestige du passé ou qu’elle connaisse un regain, s’intensifie, et la discrimination religieuse, la ségrégation et les conflits sapent l’unité nationale et posent de graves problèmes de relations humaines, particulièrement difficiles pour les écoles.
La violence montrée par les médias est un élément très important du climat social. Chez les jeunes enfants qui ne savent généralement pas comment saborder de façon constructive les conflits et les différences, on a observé avec beaucoup d’inquiétude que les images de violence diffusées par les médias récréatifs" ont un impact négatif. Les enfants sont souvent effrayés par ces images et, plus souvent encore, ils les prennent pour des modèles de comportement à adopter dans des situations conflictuelles Particulièrement inquiétante est la violence dont font étalage les dessins animés conçus et diffusés à l’intention des jeunes enfants Les éducateurs qui cherchent à inculquer la tolérance et le respect d autrui doivent commencer, même lorsqu’ils s’adressent aux enfants les plus jeunes, par leur donner des leçons qui les aideront à faire preuve de plus de conscience morale et d’esprit critique en présence de ces images et des comportements qu’elles dépeignent. On trouvera un exposé sur une initiative française de type dans "L’éducation à la paix" (publié sous la direction de Maryse Michaud par le Centre national de documentation pédagogique, Paris, 1994).
La violence est aussi une conséquence de la montée des idéologies de haine qui séduisent les jeunes et les attirent vers des mouvements politiques dirigés contre les ; immigrés et contre ceux qui sont culturellement différents. Ceux qui cherchent à enseigner la tolérance devront être sensibles aux complexités culturelles, économiques et idéologiques de la communauté considérée et connaître de beaucoup plus près les craintes, les impressions et les attitudes des jeunes. Ceux-ci sont nombreux à penser que l’avenir leur réserve non seulement le chômage mais encore une absence de but, une vie qui ne vaut guère d’être vécue et qui n’a pas de sens. La situation à laquelle les jeunes sont confrontés participe de cet intolérable qui menace toutes les valeurs préconisées ici. Pour enseigner la tolérance, il faut donner aux jeunes l’assurance que leurs enseignants, à défaut de la société tout entière, sont résolus à édifier un avenir tolérable pour les générations à venir.
Pour convaincre les jeunes qu’un avenir plus positif est possible pour eux, il faut recourir avant tout à un enseignement moral, enseignement qui les aidera à voir que beaucoup des problèmes d’intolérance et de dénuement auxquels ils sont confrontés peuvent être résolus par l’application de normes éthiques aux rapports sociaux et à la politique nationale. Les situations auxquelles nous faisons face dans le monde d’aujourd’hui sont le résultat de choix dont beaucoup sont faits en vertu de la loi du plus fort et d’un pragmatisme faisant abstraction de la moralité. L’étendue des souffrances humaines tolérées dans le monde d’aujourd’hui prouve que nous n’avons pas su insister pour faire prévaloir les normes morales auxquelles les Etats ont pourtant souscrit dans les pactes et les traités destinés à faire régner dans la société mondiale un degré tolérable de civilisation. L’expérience du passé et celle d’aujourd’hui nous enseignent que l’humanisation est possible quand on se réclame de ces normes et qu’on les fait prévaloir selon des modalités appropriées. En tout état de cause, quel que soit le sujet considéré, chaque fois que l’on fait un choix, il faut toujours tenir compte de sa dimension éthique et mesurer les effets qu’il aura sur les valeurs fondamentales de paix, de droits de l’homme et de démocratie et sur la valeur centrale qu’est la dignité humaine. C’est par la pratique du choix qu’on apprend le mieux à faire des choix éthiques. Il faut que tous les apprenants, mais surtout les enfants et les adolescents, reçoivent un enseignement qui leur donne la possibilité d’opérer des choix moraux sur des questions d’intérêt personnel et collectif . Nous savons que l’intériorisation des normes morales est facilitée par une action appliquant ces normes à des situations concrètes ; l’éducation pour la tolérance devrait fournir aux jeunes des occasions d’agir pour concrétiser les valeurs qu’ils prétendent défendre. Ces occasions devraient être authentiques et donc se situer dans le contexte d’un problème qui les préoccupe directement (...) et les jeunes devraient avoir la possibilité aux conséquences de leurs actions. Il peut être également utile de mettre les jeunes face aux conséquences des valeurs négatives qu’ils cultivent, de l’intolérance qu’ils admettent ou qu’ils pratiquent. C’est dans cet esprit qu’une visite à Auschwitz a été organisée pour quelques jeunes "crânes rasés" ("skin-heads"). L’apprentissage de la responsabilité morale est particulièrement fécond quand il s’insère dans
cycle qui va de la collecte de l’information à une réflexion d’évaluation, en passant par une réflexion morale et pratique, la prise de décision et l’action. Le cycle doit être permanent et continu sous toutes les formes possibles et adapté à tous les degrés et à tous les domaines de l’enseignement. A vrai dire, ce cycle d’étude, de réflexion morale, d’action sociale, puis de réflexion et d’étude plus poussées constitue l’essentiel du processus d’apprentissage permanent qu’exige l’instauration d’une tolérance et d’une démocratie durables.

3.3 Pour étude et discussion : préparation à la réflexion morale

Les questions suivantes peuvent être étudiées par tous les groupes et toutes les classes, mais les deux premières concernent surtout les établissements scolaires tandis que la troisième intéresse la collectivité et la formation des maîtres.
* Est-ce que votre école ou votre communauté connaît des problèmes de chauvinisme et d’aliénation chez les jeunes ? Que fait-on actuellement pour aider les jeunes à devenir capables de faire face à ces problèmes ?
* Quels sont les situations et les problèmes qui se prêteraient le mieux à l’apprentissage de la manière de faire des choix moraux dans votre groupe ou dans votre classe ? Quelles normes et quels critères établîriez-vous pour assurer la moralité et l’efficacité de vos choix et de vos actions ?
* Est-ce que les enseignants ou vos établissements bénéficient d’une formation préalable et d’une formation en cours d’emploi aux techniques du débat et à l’enseignement de la morale ? Comment la collectivité et les autres membres du personnel scolaire peuvent-ils aider les enseignants à acquérir ces aptitudes ?

3.4 Resserrer la communauté : initiatives éducatives en faveur de la tolérance

Partout dans le monde, même dans les sociétés où un conflit a déjà débouché sur la violence, il y a des personnes qui veulent instaurer la paix et développer la tolérance. On trouvera ci-après un aperçu rapide de quelques-unes seulement des initiatives de ce genre qui sont celles sur lesquelles nous disposions d’informations lorsque le présent projet a été rédigé et que nous présentons comme des exemples de mesures que d’autres pourraient également prendre.
* Compréhension entre les religions
Un peu partout dans le monde, certains groupes jugent nécessaire qu’on dispense un enseignement sur les diverses religions pratiquées dans leur pays pour développer la compréhension et combattre l’intolérance née de l’ignorance. Il convient notamment de faire état ici d’un vaste programme d’enseignement sur l’islam entrepris au Royaume-Uni par l’organisation non gouvernementale Amana.

* Scolarité commune et rencontres entre groupes en conflit
Dans les sociétés profondément divisée, le désir de changement vient presque toujours de la base . Tel est le cas d’une bonne partie des programmes d’éducation
(...)
Il s’agit tout d’abord des écoles dont toute la philosophie et la structure visent à créer la tolérance. Selon la région du monde, les école ont des appellations diverses : "pluricommunautaires", "pluri­confessionnelles", "mixtes", "intégrées", "globales".
Dans certains cas, elles suivent des philosophies pédagogiques particulières fondées sur la paix et la tolérance, comme les écoles Waldoif ou Steiner. Quel que soit le nom, les objectifs sont les mêmes. Il s’agit d éduquer ensemble sur un pied d’égalité des enfants de communautés différentes, celles-ci étant c’ représentées avec un poids égal au conseil d’administration, dans le corps enseignant, parmi les élèves et dans le programme d’études.
Parfois, il n’est pas possible de créer d’écoles de ce type. Ce sont alors des "programmes de mise en contact" fournissant aux enfants une possibilité importante, découvrir et d explorer des relations nouvelles guidés par des conseillers expérimenté (...)
L’élément commun à ces approches de l’éducation pour la tolérance est qu’elles impliquent un enseignement formel et des auxiliaires pédagogiques (...). Ceux-ci peuvent être utilisés dans les écoles mixtes ou pour préparer une mise en contact.
Dans le monde réel avec toutes ses complexités, l’association des trois approches donnera un bilan mitigé de succès et d’échecs. Trop souvent encore, ces initiatives dues à une minorité sont contrecarrées par le sectarisme extrême et le climat social que nous avons décrit. Il n’empêche que, comme nous le verrons plus loin, certaines communautés essaient.

* Une expérience de réconciliation
L’Institut Novalis, qui forme des enseignants sud­africains aux méthodes des écoles Waldorf, expérimente, indique une préparation des enseignants grâce à laquelle ceux-ci contribueront à guérir leur pays de son passé raciste et à le reconstruire. Voici un extrait de son rapport : En Mexique du Sud, le régime d’apartheid a parfaitement réussi à maintenir séparés les mondes où vivent les différentes communautés du pays. L’Institut Novalis a quant à lui parfaitement réussi à rapprocher ces mondes et à faciliter l’instauration d’une nouvelle réalité et une conscience nouvelles... Ce changement de conscience et de perception des individus et des groupes qui ont eu le privilège de prendre part au processus que l’Institut Novalis a facilité est à mon avis le résultat le plus important et le plus précieux qu’on pouvait espérer obtenir. Il a ouvert la voie et jeté les bases d’une communauté nouvelle et intégrée.

* L’instruction civique pour une démocratie multiculturelle
En Israël, il a été créé un Département de la démocratie et de la coexistence. Il diffuse des directives et contribue à mettre au point, dans tout le pays, des programmes et projets éducatifs faisant une large place à la formation des enseignants en cours d’emploi.Les programmes destinés aux enfants s’appuie, très largement sur les arts plastiques, et sur la pratique des techniques de participation dans une société démocratique, et en particulier des discussions Pour atteindre ce dernier objectif, le Département favorise l’introduction de pratiques démocratiques dans les écoles et, ce qui compte beaucoup pour l’instauration de la tolérance, "insiste sur l’importance de la politesse dans le langage... Il reconnaît la nécessité de cultiver l’identité culturelle des élèves arabo-israéliens comme des élèves judéo-israéliens en vue de promouvoir une société multiculturelle" (Brochure d’information du département).

Agir pour notre avenir commun : l’éducation multiculturelle
En Namibie, la Fondation Friedrich-Ebert a produit un ensemble multirnédia dans six langues autochtones. La
tolérance y est définie comme une "action et une préoccupation collective pour notre avenir commun". Un second projet namibien est du au Ministère de l’éducation. C’est un projet culturel visant à enrichir les programmes d’études par la culture namibienne, elle-même "riche de sa diversité". Dix établissements pilotes répartis dans le pays collaborent avec les communautés environnantes pour renforcer les aspects culturels des programmes, surtout dans le domaine de la formation professionnelle et des arts plastiques. Beaucoup de projets créatifs ont été conçus à partir d’idées avancées par les élèves. Parmi les objectifs d’apprentissage de la tolérance que comportent les projets destinés aux enseignants et aux élèves, on peut mentionner ceux qui tendent : à déceler des valeurs dans la nature et à les respecter ; à apprécier le travail qu’accomplissent et qu’ont accompli les personnes âgées, c’est-à-dire leur propre histoire ; à apprendre à connaître et à respecter la communauté environnante et des modes dc vie autres que celui de la société de consommation.

* Partager un espace et une finalité
En Slovénie, une Ecole associée de l’UNESCO a mis au point un programme type à l’intention des enfants slovènes et bosniens-herzégoviniens des classes élémentaires. Le modèle comporte les éléments de base nécessaires à une initiative de ce genre : appui de la communauté, participation des parents, préparation des enseignants et nu se au point des matériels pédagogiques. Beaucoup de communautés pourraient adapter ce modèle, qu’elles soient en proie à la violence, qu’elles se trouvent à la veille ou au lendemain d’un conflit ou qu’elles accueillent des réfugiés de différentes cultures. "Le programme favorisera chez tous les participants, communauté, parents, enseignants et élèves, un apprentissage visant à :
* faire connaître les droits de l’homme tels qu’ils sont définis dans les nonnes internationales promulguées par les Nations Unies ;
* renforcer ou modifier les opinions et convictions relatives aux valeurs de la paix, de la tolérance dans les relations mutuelles et des droits de tout être humain ;
* renforcer ou modifier les attitudes CL les comportements envers autrui pour favoriser mie coopération tolérante et un penchant à l’aide mutuelle". (Rapport à l’École associée de l’UNESCO>

* Une étude sur la violence
En Colombie, pays qui connaît de multiples formes de violence depuis des siècles et qui subit depuis quelques années ce qui est presque une guerre entre l’État et les trafiquants de drogue, la lutte contre la violence est devenue l’objet d’un programme intitulé "Construction d’une culture de paix". Au titre de ce programme exécuté par l’intermédiaire des Écoles associées avec le soutien et la coopération du Ministère dc l’éducation, on a cherché à connaître les idées que des milliers de jeunes dans tout le pays se faisaient de la violence et de la paix. Le projet a permis de savoir comment ces jeunes voient leur société et sous quelle forme ils en envisagent une qui serait plus pacifique et plus tolérante. Un projet de ce genre serait un bon début pour beaucoup de communautés qui veulent lancer des programmes d’éducation pour la tolérance.

* Activités périscolaires
Parmi les pays européens où les éducateurs cherchent à résoudre les problèmes du multiculturalisme, la France est particulièrement active dans le secteur périscolaire, encourageant des rencontres entre adolescents de différentes cultures, créant des occasions d’organiser librement la discussion pour aider les jeunes à comprendre les différences et à en voir la complémentarité. Certaines écoles ont créé des clubs de droits de l’homme. En Norvège, le programme intitulé "La
communauté du son" réunit des enfants de nombreux groupes ethniques pour des exécutions musicales destinées à combattre les préjugés et le racisme. Le Conseil de l’Europe encourage des activités similaires en Allemagne, une grande initiative intitulée "Des étrangers dans notre ville" a réuni des participants de les âges dans des efforts visant à lutter contre le préjugé.

* Célébrer le potentiel de la jeunesse
La célébration de la personnalité humaine se rencontre dans la quasi totalité des cultures. La célébration est en effet une façon de partager les aspects de l’identité culturelle qui marquent les communautés humaines. Les fêtes culturelles de toutes sortes sont un moyen très efficace de rechercher la compréhension inter culturelle dans un cadre national ou international. Le Festival international de la jeunesse du Tchad, organisé conjointement par le Ministère de l’éducation et la Commission nationale pour l’UNESCO, a donné d’excellents résultats. Ce festival qui s’est tenu en novembre 1993 a réuni des jeunes de divers groupes ethniques et tribaux pour lancer une campagne de revalorisation de la culture grâce à laquelle les jeunes de tous ces groupes ont pu partager leurs traditions culturelles, apportant ainsi leur contribution à la communauté que tous ensemble ils constituent.
Les valeurs essentielles exprimées par les diverses délégations ont clairement montré qu’il était possible d’établir des relations mutuellement fécondes entre les cultures - solidarité active en tant que mode d’acceptation de l’autre ; dialogue en tant que moyen d’abattre les barrières de haine qui séparent les peuples ; respect de l’autre en tant que base de la compréhension mutuelle et de la paix. Le festival a reconnu l’importance de la jeunesse, groupe de population principal de l’Afrique et du monde et source de potentiel humain d’où sortiront les dirigeants et les responsables.

* Les droits de l’homme et l’enseignement multiculturel
En 1991, l’Ecole Sainte-Marie de Hann au Sénégal, qui est une Ecole associée de l’UNESCO, s’est vu décerner le prix UNESCO de l’éducation pour la paix. L’école a 4.000 élèves des deux sexes de 48 nationalités différentes et les classes vont du jardin d’enfants au second degré. Ses activités comprennent notamment :- l’édification à l’intérieur de l’école d’une Maison des cultures qui organise des expositions itinérantes et des rencontres avec des artistes pour promouvoir la découverte de cultures diverses par les jeunes
 la création d’une fondation "arc-en-ciel" qui encouragerait et stimulerait au Sénégal les diverses initiatives en faveur de la compréhension internationale.

* Reconnaître le biculturalisme
Dans certains pays où les cultures autochtones ne sont pas en honneur et où les programmes d’études ne tiennent pas compte des aspirations et des réalisations d’une partie de la population, les Ministères de l’éducation cherchent actuellement à réparer cette injustice. On peut mentionner comme exemple l’inclusion de la langue et de la culture maories dans le programme des petites classes du système scolaire néo­zélandais qui fait place au biculturalisme. Ce programme reconnaît ainsi l’importance de la langue ou de l’intégrité culturelle et fait montre du sens de la dignité humaine : respect d’autrui, l’équité pour tous et la r naissance des différences sont des marques de i la maturité et de la tolérance d’une société ... Une société dans laquelle toutes les personnes sont respectées pour ce qu’elles sont exige une compréhension d’autres cultures" (Citation du programme d’études). Des efforts similaires pour les langues autochtones sont faits dans d’autres pays. Le Brésil, par exemple, organise un programme d’alphabétisation en langue tikuna. Dans beaucoup de pays, l’étude des cultures et des problèmes des peuples autochtones est devenue une pièce maîtresse de l’éducation pour la tolérance américains en particulier mettent actuellement au
dans tous les domaines. Les éducateurs canadiens et américains en particulier mettent au point des matériels pédagogiques et des programmes pour un enseignement sur les nombreuses cultures des premiers Américains. Les Ecoles associées du Costa Rica ont organisé un programme intensif consacré aux cultures des diverses populations autochtones du pays Ce ne sont là que quelques exemples des nombreuses initiatives qu’il est possible de prendre ou qui sont déjà prises en vue d’éduquer pour la tolérance.

Pour étude et discussion : envisager des initiatives en faveur de l’éducation pour la tolérance

* Est-ce que le dispositif scolaire actuellement en place dans votre communauté permet et/ou encourage les contacts et l’apprentissage entre groupes ?
De quelles façons ces formes de scolarisation et d’activités de jeunesse pourraient elles favoriser le développement de la tolérance chez les jeunes et dans la communauté ?
* Grâce à quels genres d’initiatives pourrait-on améliorer le climat en faveur d’une éducation pour la tolérance dans votre communauté et/ou votre école ?
* Quelles leçons de tolérance pourrait-on tirer de l’adoption de l’une ou de la totalité des approches ci-dessus depuis la conception et la planification initiales jusqu’au bilan et à l’évaluation ?

4. La tolérance à l’école. Un laboratoire pour la pratique de la tolérance

Comme le montrent le cadre, les objectifs et les méthodes d’enseignement présentées dans ce guide, l’éducation pour la tolérance se fonde sur des principes pédagogiques judicieux, elle est un moyen de réaliser les objectifs généraux de l’éducation et elle constitue une nécessité sociale. L’introduction de l’éducation pour la tolérance à l’école mérite donc le soutien et la mobilisation des communautés parce que c’est une éducation sérieuse, pertinente et nécessaire.

4,1 L’école, agent d’intégration ; la société et centre communautaire

L’école ou la "scolarisation", au sens d’instruction délibérément conçue pour intégrer les enfants et les jeunes à la société, que cette instruction ait lieu dans une école ou en dehors d’une école, est le moyen le plus direct d’enseigner les valeurs sociales. C’est donc cette institution, quelle qu’en soit la forme, qui doit assumer une grande partie de la responsabilité d’une éducation visant des objectifs sociaux. A mesure que les animateurs communautaires, les parents, les autorités scolaires, les formateurs d’enseignants et les enseignants eux-mèrnes s’attachent à planifier et à exécuter un programme d’éducation pour la tolérance, l’école devient l’élément moteur de l’éducation de communautés entières. Il s’ensuit que le présent guide est axé sur l’école, mais qu’il est également destnié à un public plus vaste. L’école a en effet été et, dans certaines régions du monde, continue à être un centre communautaire. Non seulement des activt tés communautaires se déroulent dans les écoles, mais c’est la conception, la planification et la préparation de l’avenir des jeunes qui peuvent donner aux communautés une possibilité de se réunir pour formuler et poursuivre leurs objectifs communautaires.
Les écoles peuvent alors être à la fois des forums pour l’édification de la communauté et des instructeurs de tolérance. Il faut qu’elles soient des lieux où la tolérance se pratique autant qu’elle s’enseigne.

4.2 Principes pour la pratique de la tolérance à l’école

Pour pouvoir jouer ce rôle, les écoles auront besoin de principes et de directives pour la tolérance.
On trouvera ci-après une liste des "ingrédients" d’une éducation antiraciste telle qu’elle vient d’être établie par la Fondation Anne Frank (Pays-Bas). C’est une liste excellente de principes devant régir une éducation pour la tolérance.
1. Responsabilité de l’école [éduquer pour la tolérance]
2. Approche positive des aspects ethniques
3. Apprendre à penser inclusivement
4. Intégrer une éducation interculturelle
5. Insister sur les similarités
6. Combattre le racisme sur un large front
7. Créer une atmosphère positive à l’école.

4.3 Valeurs et éducation interculturelle

(...) L’éducation interculturelle devrait :
— - reconnaître les interactions qui se produisent entre cultures ;
— - reconnaître les valeurs de cultures différentes d’une manière qui ne dissimule pas les rapports de domination, mais rehausse le prestige de la culture des immigrés ;
— - remettre en cause les critères d’évaluation fondés sur les préjugés sociaux et l’ethnocentrisme ;
— - introduire l’approche interculturelle dans tous les secteurs de l’organisation et de la vie de l’école ;
— - développer la solidarité et l’acceptation mutuelles dans la communauté vivante de l’école ;
— - reconnaître et apprécier le rôle symbolique de la présence de langues maternelles à l’école ;
— - promouvoir une approche pluraliste de acquisition du savoir ;
— - reconnaître que les arts permettent d’apprendre à apprécier des cultures différentes promouvoir une activité interculturelle parmi les élèves et reconnaître que celle-ci dépend de la qualité de la coopération au sein des équipes enseignantes ainsi qu’entre enseignants locaux et étrangers ;
— - promouvoir les communications entre les écoles, les farnilles, le milieu social dans lequel vivent les enfants et la communauté tout entière, c’est-à-dire comprenant à la fois immigrés et autochtones
— - reconnaître que l’éducation interculturelle fournit une perspective qui concerne à la fois les pays d’origine et les pays d’accueil et qui appelle une solidarité entre des pays ayant des niveaux de ressouroes différents
— - développer chez les enseignants des aptitudes qui permettront à ces principes de devenir une réalité pratique.

4.4 Un cadre pour enseigner la tolérance : objectifs et problèmes sociaux

L’éducation dispensée par la société vise à promouvoir des valeurs, à atteindre des objectifs et à résoudre des problèmes. L’éducation est conçue pour inculquer aux élèves les connaissances et les capacités qui leur permettront de mettre en pratique dans leur comportement des valeurs servant la société et d’agir pour faire en sorte que les orientations et les décisions de leur société soient régies par ces mêmes valeurs. Le cadre dans lequel la tolérance est enseignée découle ainsi de valeurs et d’objectifs, ainsi que de problèmes et d’obstacles à la mise en oeuvre des valeurs et à la réalisation des objectifs.
Comme pour tout système vivant, le bien-être de la société humaine dépend de la bonne intégration de ses diverses parties.
Ainsi, la tolérance est indispensable à la bonne intégration des différents membres de la société humaine. Cependant, de même que les systèmes vivants doivent aussi être protégés contre les éléments qui compromettent leur santé et leur bien-être, il est des situations que la société ne saurait tolérer. (...)

4.5 Pour étude et discussion : s’attaquer aux problèmes

* Réfléchissez au rapport entre la tolérance et la paix. Quelles sont dans le monde les formes de violence que vous considérez comme les plus néfastes ? Votre communauté souffre-t-elle de la violence ? Sous quelles formes ? Existe-t-il des solutions de rechange non violentes ?
* Quelles sont à votre avis les atteintes les plus graves aux droits de l’homme dans le monde ? Avez-vous connaissance d’efforts faits polir y remédier ? Y a-t-il dans votre communauté des problèmes concernant les droits de l’homme ? Comment y remédie-t-on ?
* Quelles sont les entraves les plus graves à la démocratie ? Comment la communauté mondiale pourrait-elle remédier à l’une quelconque de ces entraves ? Comment votre propre communauté pourrait-elle participer à ce processus ?

4.6 Objectifs généraux d’apprentissage : valeurs, connaissances et compétences

Les objectifs de l’éducation pour la tolérance sont vastes et complets, englobant tout un éventail de sujets et de compétences se rattachant à la valeur de la dignité humaine et aux autres valeurs qui ont été définies ici comme issues de la tolérance.
Les connaissances indispensables à la pratique de la tolérance sont fonction des valeurs recherchées. (...)
Le but est de faire acquérir à ceux qui suivent l’enseignement des capacités qui leur permettront de faire face dans un esprit constructif à toutes sortes de différences entre les hommes, de controverses politiques et de conflits sociaux. Quand on formule ainsi ces grands objectifs de l’apprentissage, il est utile d’y ajouter une sorte de récapitulation générale de ce que ceux qui vont pratiquer la tolérance devraient respecter, savoir et être capables de faire. (...)

4.7 Pour une participation positive à un monde de diversité un processus d’enseignement de la tolérance

La tolérance, nous l’avons vu, est la valeur critique permettant d’inverser les processus d’intolérance et de violence. Quand on veut éduquer pour la tolérance, il est utile d’envisager le processus éducatif comme une série de domaines d’expérience constituant un processus d’apprentissage permanent pour une culture de paix. La planification d’expériences éducatives destinées à faciliter l’accès des élèves à ces domaines peut être considère en termes de qualités humaines et de capacités. La tolérance est envisagée ici à la fois comme une valeur critique, ou condition d’édification de la paix, et comme une capacité croissante à faire édifier la paix. Pour que la tolérance ouvre la voie à un processus plus vaste d’éducation pour la paix, les droits de l’homme et la démocratie, il faut que son champ d’action soit sans cesse élargi. Cet élargissement devra toujours être tempéré par les valeurs fondamentales de dignité et d’intégrité humaines, les limites que la tolérance ne saurait franchir apparaissant quand il est porté atteinte à ces valeurs fondamentales. Les domaines d’apprentissage ci-après constituent ainsi un processus d’enseignement de la tolérance (...)
· Tolérance : Reconnaissance du droit des autres à la vie et à l’existence
. Contacts : Attitude favorable à la présence d’autres personnes dans notre sphère sociale
· Respect de la différence : Reconnaissance des aspects positifs de la diversité
. Compréhension de l’unicité : Appréciation des formes particulières de la diversité humaine. La complérnentarité en tant que principe du rapport à la différence. Capacité à intégrer les différences de manière à enrichir et à renforcer la société.
. La réciprocité en tant que base des efforts de coopération : Capacité de concevoir des objectifs communs mutuellement avantageux pour divers groupes à oeuvrer pour les atteindre
. Une culture de paix : Reconnaissance de l’inter-dépendance et des universaux humains, et engagement à oeuvrer en faveur d’aménagements positifs de la diversité dans un monde interdépendant.

4.8 Pour étude et discussion : mise en route d’un processus d’apprentissage de la tolérance

Comment le cadre présenté ici pourrait-il être adapté à la situation particulière de votre communauté et de vos classes ?

* Quelles possibilités y a-t-il dans votre école, ou dans vos écoles, pour un apprentissage en coopération et pour une formation au règlement des conflits ? Vos enseignants ont-ils été formés à ces méthodes ?
* Quelles sont, en matière d’éducation relative aux droits de l’homme, les questions et les préoccupations dont l’étude serait la plus opportune dans vos écoles et vos communautés ?
* Comment votre classe ou groupe peut-il déterminer s’il est prêt à étudier et à agir dans les divers secteurs qui constituent le processus d’apprentissage conduisant à une culture de paix ? Par quels moyens pouvez-vous pousser l’étude et la pratique au-delà de la valeur critique de la tolérance ?
(...)

5. La tolérance en classe dans chaque discipline, à chaque niveau et dans chaque pays

La première moitié du présent guide a été consacrée à la raison d’être, au cadre et au contexte de l’éducation pour la tolérance. Le présent chapitre porte sur la pratique dans les classes et présente des suggestions sur les modalités d’intégration de l’éducation pour la toléranec dans les progranunes d’études, ainsi que quelques exemples sur la manière dont certaines leçons pourraient être faites. Il existe beaucoup d’autres possibilités, et l’UNESCO espère que les utilisateurs du présent ouvrage voudront bien lui faire part de leurs idées et de leurs expérienoes afin qu’il en soit tenu compte dans une version revue et augmentée de ce guide.

5.1 Instiller la tolérance dans toutes les disciplines :

Comme tous les autres aspects de l’éducation pour la paix, les droits de l’homme et la démocratie, la tolérance peut et doit être introduite dans les écoles au moyen de deux approches fondamentales : une instruction explicitement destinée à atteindre les
objectifs éducatifs visés et l’instillation dans toutes les activités scolaires des thèmes, de la morale et des comportements de la tolérance. Toute discipline, toute activité offre des possibilités de communiquer aux elèves les concepts, les valeurs et les pratiques par lesquels la tolérance contribue à la formation des communautés. L’école est elle-même à la fois une
comnunauté et un laboratoire pour l’apprentissage d’une participation à des communautés plus vastes au niveau local, national et mondial.

5.2 L’enseignement des langues : vecteur d’un apprentissage transculturel

L’ apprentissage des langues est l’une des modalités les plus fécondes de l’éducation pour la tolérance et la compréhension mutuelle, c’ est seulement par la maîtrise de sa langue qu’ on peut comprendre pleinement et vraiment une autre culture : l’étude d’une langue qui entraine celle de l’ histoire et de la culture d’ un peuple offre la possibilité de leçons sur certains des sujets suivants :
* les valeurs culturelles et les expériences et événements qui ont influé sur leur formation ;
* les coutumes et institutions sociales, envisagées dans une perspective comparatiste qui illustre les différeutes formes sous lesquelles des universaux humains, tels que la structure familiale, les célébrations, les occasions de deuil, etc., trouvent leur expression ;
* la lecture à haute voix de poèmes, récits épiques ou paroles d’hymnes nationaux pour servir de base à une réflexion sur la façon dont un peuple a réagi à son vécu collectif.

5.1.2 la littérature, une clé pour l’étude des valeurs

La littérature d’autres cultures, même en traduction, fournit une base qui permet de comprendre les valeurs et l’expérience des autres d’une façon plus vivante et plus humaine que par l’étude d’une histoire nationale, résumé de l’expérience sociale d’un peuple. Parmi les nombreux procédés utiles pennettant d’enseiener à la fois la tolérance et la littérature, on peut mentionner ct qui suit :
*dans un cours sur une épopée nationale, donner au moins des extraits et des résumés de récits épiques d’une ou deux autres cultures pour montrer combien cette forme d’art est courante ;
* des histoires et comptines pour enfants tirées de différentes cultures pourraient être inscrites aux programmes des jardins d’enfants et des écoles maternelles ;
* les élèves des écoles primaires pourraient étudier comment diverses cultures célèbrent et honorent leurs héros dans des récits qui retracent leurs vertus et leurs mérites ;
* les établissements secondaires pourraient donner des cours de littérature inulticulturelle pour faire connaître aux jeunes les ouvrages des grands écrivains de diverses cultures contemporailis des grands écrivains de leur pays ;
* les grands textes de diverses religions devraient aussi servir de base à des cours destinés àéduquer pour la tolérance.


5.1.3 L’histoire : vers une conception inclusive de l’expérience humaine

L’enseignement de l’histoire a souvent contribué à susciter des attitudes d’hostilité, d’exclusion et de préjugé à l’encontre des autres. La population d’un pays connaît en général sa propre histoire par la présentation qui en est faite du point de vue de ce pays, laquelle ne tient guère compte du regard porté par d’autres groupes sur les mêmes événements. Il est fréquent aussi que les faits concernant les femmes et les minorités n’y soient pas relatés. La plupart du temps, les guerres et les conflits retiennent davantage l’attention des historiens que la paix et la coopération. L’effort d’éducation pour la tolérmice doit donc s’attacher à corriger et à compléter les récits historiques classiques. Pour ce faire, on peut notamment :
* demander aux élèves de rechercher les propositions de paix qui ont pu être faites pour prévenir les guerres relatées dans leurs manuels ;
* inviter les élèves à réfléchir eux-mêmes aux mesures qui auraient pu être prises pour éviter les guerres et autres manifestations de violence ;
* des classes pourraient rédiger en collaboration une "histoire de l’avenir" qui montrerait comment, grâce à l’éducation pour la tolérance", l’humanité "a été guérie du fléau de l’intolérance", et comment l’avènement de la tolérance a conduit à la paix ;
* des élèves de groupes minoritaires pourraient répéter en classe des récits que leurs grands-parents et leurs parents leur olit fait de certains événements de manière à donner une dimension nouvelle à la version officielle ;
* 0n pourrait projeter des films d’autres pays présentant des évènements historiques sous des angles différents ;
* des élèves pourraient faire des recherches et "imaginer" des événements du point de vue de ceux dont on ne relate pas l’histoire, comme les populations autochtones, les femmes et les groupes ethniques qui ont été détruits ou assimilés par abandon de leur culture ;
* on pourrait organiser des jeux de rôle retraçant de grands moments de l’histoire pour discerner si les décisions prises procédaient de la tolérance ou de l’intolérance.

5.1.4 Etudes sociales et instruction civique apprendre les normes de la tolérance

Dans les disciplines qui fournisseut son contenu à l’instruction civique, l’éducation pour la tolérance devrait se fonder sur les normes internationales en matière de droits de l’homme, sur les possibilités de les mettre en oeuvre et sur les obstacles a leur application. Il existe pour ce faire un très large éventail de pratiques éducatives Parmi les plus faciles à adapter, il convient de mentionner les suivantes :
* afficher dans chaque classe un exemplaire de la Déclaration Universelle des droits de l’homme et la la Convention des Nations-Unies aux droits de l’enfant. Dans l’enseignement primaire, on peut utiliser l’une des versions simplifiées de ces documents. Débattre une fois par jour ou par semaine, pendant toute la période scolaire, d’un article de l’un de ces documents ou des deux.
* faire appel à des concepts et à des normes relatifs aux droits de l’homme pour rédiger le règlement de la classe ;
* faire préparer par les élèves du cours d’études sociales et/ou d’instruction civique une assemblée spéciale pour la Journée des droits de l’homme du 10 décembre ;
* étudier la Déclaration des Nations Unies sur la tolérance ainsi que tes circonstances qui ont amené l’ONU à adopter cette déclaration. Discuter des situations dans le monde d’aujourd’hui qui ont ainené l’ONU à s’occuper à nouveau de cette question. Que pourrait-on faire pour tenter d’instaurer la tolérance dans les régions du monde en proie à l’intolérance et aux conflits entre groupes ?
* étudier ce que l’ONU, l’UNESCO et les organisations non gouvernementales peuvent faire pour protéger les droits de l’homme. Débattre de ce que les élèves eux-mêmes peuvent faire. Entreprendre des activités d’apprentissage des droits de l’homme telles que la rédaction de lettres et la participation aux efforts d’organisations en faveur des droits de l’homme.


5.1.5 Les sciences : questions d’éthique et de responsabilités

L’ éducation pour la tolérance dans l’enseignement des sciences au niveau secondaire fournit une bonne base pour présenter et explorer les questions relatives aux responsabilités qui vont de pair avec le savoir. En étudiant l’histoire du XXe siècle, les élèves découvriront que la science n’a pas seulement permis d’atténuer les souffrances ou de lutter contre l’injustice, mais qu’elle a été mise aussi au service de l’into­lérance. A mesure qu’ils acquerront des connaissances scientifiques, ils seront appelés à faire des choix quant à la manière d’utiliser leur savoir. Les suggestions ci-après posent des questions d’éthique et de responsabilité.
Les cours de physique pourraient être l’occasion de soulever certaines des questions de choix ci-après :
* les implications éthiques de l’utilisation de la physique pour la conception d’armes de destruction massive ou la mise au point des moyens de pratiquer des génocides ou des tormres ;
* le contenu et la signification des "déclarations de conscience" faites par des physiciens.
A l’occasion des cours de sciences exactes et naturelles, quelques-uns des sujets ci-après pourraient être abordés :
* les processus par lesquels les systèmes naturels s’adaptent au changement et à l’introduction d’éléments nouveaux ou "étrangers" ;
* les principes de la symbiose et la manière dont certaines formes de vie élaborent des modes de coexistence et d’interdépendanoe ;
* le Manifeste de Séville sur la violence (UNESCO, 1992), qui récuse les théories relatives à l’instinct humain d’agression, base pour l’établissement de la tolérance comme norme sociale et pour l’avènement d’une culture de paix.


5.1.6 Mathématiques : les statistiques de l’équité

En tant que valeur positive, la tolérance exige l’équité économique et la justice distributive. Pour atteindre ces deux objectifs liés à la tolérance, il faut savoir quelles sont les ressources et comprendre la façon dont elles sont utilisées, réparties et partagées. Quelques-unes des activités ci-après pourraient aider les élèves àcomprendre les incidenoes des structures et des modalités de l’économie sur les valeurs.
* Utiliser les statistiques de l’alphabétisation, notamanent celles qui concernent les différences entre les hommes et les femmes et entre les pays du Nord et ceux du Sud pour montrer comment se traduisent les avantages et les inconvénients en matière d’éducation.
* Utiliser des chiffres comparatifs relatifs aux dépenses d’armement et aux dépenses sociales pour calculer le pourcentage de la richesse mondiale consacré à des conflits violents.

5.1.7 Art : expression des universaux humains

De tous les domaines se prêtant à l’éducation pour la tolérance, l’art.est probablement le plus prometteur ; il est le le moyen par lequel les aspirations humaines universelles s’expriment de la manière la plus vivante. L’enseignement de l’appréciation comme de l’interprétation de l’art peut fournir l’occasion d’entreprendre l’une des actions suivantes et beaucoup d’autres encore :
* dans les cours d’histoire de l’art, il conviendrait de faire figurer des exemples d’oeuvres de la période considérée provenant d’autres cultures. La peinture, la sculpture, etc., devraient être étudiées sous l’angle de thèmes humains universels et de la façon dont ceux-ci s’expriment selon les cultures ;
* les arts populaires traditionnels pourraient être étudiés comme des moyens de découvrir les valeurs ainsi que le sens esthétique et créateur de diverses cultures
* les oeuvres d’art pourraient être utiliséés pour juger du climat de tolérance qui règne dans une société fait des "autres" vivant dans un pays ou de populations lointaines ;
* on pourrait étudier les arts et les médias populaires pour y déceler éventuellement des exemples de stéréotypes, de racisme, de sexisme, de dénigrement ou de diffamation. On pourrait étudier également les caricatures publiées juste avant ou pendant les guerres et les chocs culturels pour déterminer comment l’art populaire a été utilisé pour attiser les flammes de l’intolérance ;
* dans les cours de pratique artistique, on pourrait choisir des thèmes relatifs à la tolérance, aux droits de l’homme et à la paix comme sujets de dessins, de peintures ou d’affiches scolaires ;
* les enfants pourraient dessiner le "jardin de la diversité humaine" illustrant par des visages différents la merveilleuse panoplies êtres humains ;
* on pourrait louer et chanter la musique des mouvements de défense des droits de l’homme et des groupes ethniques et la prendre pour thème de discussion afin de découvrir les valeurs et les buts de groupes ethniques ou autres, qui luttent pour la. tolérance et les droits de l’homme. Les élèves pourraient débattre de la manière dont la musique et l’art fournissent inspiration et énergie pour ces combats ;
* les élèves pourraient composer et exécuter leur propre musique pour célébrer la tolérance les droits de l’homme et la paix.