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Filles / garçons Éducation à l’égalité ou transmission de stéréotypes sexistes ?

samedi 25 août 2012, par phil

Conférence Mosconi : Problématique Filles/garçons
Filles / garçons Éducation à l’égalité ou transmission de stéréotypes sexistes ?


 Les recherches de Belotti (Du côté des filles) ont montré que commence jeune la nécessité d’une éducation à l’égalité filles – garçons. Rapidement les enfants apprennent des clichés, adoptent des comportements stéréotypés. Les filles et les garçons s’installent dans des espaces différents en classe, chacun est dans son groupe et séparément. Dès le CP s’observe ce phénomène.
 L’égalité des places et l’égalité des chances sont une question du « vivre ensemble ». La problématique. C’est une problématique sociétale de laquelle l’école hérite.
 La question filles/garçons relève d’une transmission de stéréotypes, c’est une question d’égalité entre les sexes.
 La question des égalités entre les sexes est occultée par la question des inégalités sociales. On parlait cependant de différences mais on ne spécifiait pas qu’il s’agissait d’inégalités.
 Les femmes et les hommes ne sont pas égaux car ils sont différents, ils sont non identiques dans un registre ontologique (l’essence). Au niveau d’un registre juridique : on a un rapport différence/identité et égalité/inégalité. La différence d’identité sexuelle engendre de l’inégalité.
 Le genre est un système social, un ordre social qui organise les rapports de pouvoir entre le groupe des hommes et le groupe des femmes. Cela se traduit par un système de normes de sexe interdépendantes (le masculin et le féminin) hiérarchisantes, définissant des attributs physiques, psychologiques et des rôles, des conduites et des comportements (y compris dans les relations entre les sexes).
 Le genre n’est pas déterminé par le sexe biologique, c’est le social qui détermine. Le genre est une construction. Le sexe dont on parle de manière générale est le sexe d’état civil : h ou f. Le masculin et le féminin ne définissent pas des identités mais des normes. Il convient de casser la hiérarchisation des sexes, déjà posée par le langage. (cf. le masculin l’emporte sur le féminin en grammaire). Le fond de l’affaire : c’est la domination masculine. On parle de femme masculine, les hommes féminins sont mal vus.
 La théorie du genre a fondé la théorie du sexisme (en lien avec le racisme) en tant que facteur de dévalorisation, de discrimination… Inégalité de sexe ou inégalité de genre ?
 La socialisation est la transmission de savoirs de sens communs. La socialisation différentielle des sexes engendre des stéréotypes de sexes. Notre langue nous aide pour organiser notre monde. Il est utile de catégoriser pour observer le monde. A 2 ans, un enfant sait s’il est fille ou garçon. La catégorisation poussée à l’extrême est une caricature et une croyance rigide. C’est un stéréotype qui oppose un groupe contre l’autre.
 On fabrique du genre, de la différence pour fabriquer de la hiérarchie de valeur. Le masculin et le féminin ont pour fonction de situer une place sociale.
 La manière de catégoriser les hommes et les femmes pousse à des automatismes. Il y a un changement de perception, de comportement ; les interprétations de comportement : on ne juge pas pareillement une fille et un garçon. Les attentes sont différentes selon qu’il s’agit d’une fille ou d’un garçon.
 Sommes-nous tous sexistes ? Oui. Car nous avons tous appris des savoirs de sens commun : un système de croyances traditionnelles et familiales qui se transmettent très tôt. L’enfant apprend aussi la division des tâches entre les deux sexes. Ils n’effectuent pas les mêmes tâches domestiques, ni les mêmes métiers, ils ne partagent pas les mêmes savoirs. On s’adresse au papa pour une demande d’explicitation mathématique, à la maman pour le français. Les enfants apprennent à qui revient ceci, à qui revient cela selon les sexes. On n’offre pas les mêmes jouets selon le sexe des enfants.
 Les jouets préfigurent le monde adulte : la division des jouets préfigure la division des tâches et des métiers, la division des savoirs. A l’arrivée à l’école, l’enfant est « riche » de tout cela : c’est son bagage de sens commun plutôt défavorable à la sphère féminine.
 Au regard de la socialisation scolaire, on observe de nombreuses influences des stéréotypes sexués à l’école. Il y a un ensemble de phénomènes très petits et très quotidiens conduisant à une socialisation homme/femme très différente. La récréation montre des phénomènes sexistes. Dans la classe, les garçons et les filles n’occupent pas la même place. Les garçons occupent l’espace sonore au détriment des filles. Le leadership dans la classe est du côté des garçons.
 Relativement aux relations enseignants/élèves, la différenciation sociale se produit de manière implicite. C’est un automatisme. Les professeurs subissent des réactions automatiques dans les interactions de classe : 1/3 du temps, les filles ont la parole, 2/3 du temps, les garçons ont la parole. De plus, la division d’une relation aux savoirs s’exprime de la façon suivante : pour les pré requis, on s’adresse aux filles et aux garçons pour les savoirs nouveaux. Les filles sont des « gardiennes » du savoir lorsque les garçons sont des « aventuriers de la connaissance ». Les attentes des enseignants sont différentes selon le sexe tant en termes de connaissance que d’attitude : la fille est sage, docile, alors que le garçon est considéré comme naturellement plus remuant, agité. Devant les résultats scolaires médiocres, on dira d’une fille qu’elle n’est pas douée, mais du garçon, on dira qu’il est flemmard. A moyenne scolaire identique, les filles se déprécient par rapport aux garçons. Selon les matières, les mathématiques sont pour les garçons (une affirmation identitaire). Les profs de physique attendent plus des garçons que des filles. Les stéréotypes de sexes influencent ainsi également les catégorisations dans l’univers scolaire.

 Nicole Mosconi s’est particulièrement intéressée à la question de la transmission des savoirs et de l’orientation, qui est inégalitaire entre filles et garçons.
 Pour ce faire, il faut se référer à la notion de « curriculum caché ». Le curriculum prescrit est ce que l’institution commande comme apprentissage, le curriculum réel est ce que l’on apprend réellement en classe. Le curriculum caché est tout ce qui s’apprend à l’école sans jamais l’avoir voulu, sans jamais que cela ait trait aux programmes scolaires. Il existe un curriculum caché concernant la division des sexes. On n’enseigne des choses non voulues et ancrant une différenciation filles/garçons.
 En 1923, il apparaît l’alignement des programmes filles/garçons. Les programmes sont écrits à l’aune des garçons. Tous les programmes sont faits pour rendre les femmes invisibles (qui outre Marie Curie est enseignée comme femme savante ? et qui ne sourit pas avec ce terme de femme savante qui renvoie à la pièce de Molière ? Quelle femme poète enseignée ?). Nous avons peu de représentations positives des femmes. Elles ont une place seconde dans les programmes et secondaire dans la classe au regard des interactions. Par ailleurs, les sciences humaines travaillent depuis le point de vue des hommes, elles s’étudient au travers d’un fort prisme masculin.

 L’orientation scolaire est divisée car le marché du travail est divisé. Plus on est dans le « professionnalisant », plus la différence d’orientation est forte. Les femmes sont concentrées sur 5 secteurs d’activité.
 Ce sont des secteurs de salaires faibles. Les femmes sont minoritaires dans l’industrie et la construction, très nombreuses dans les emplois du tertiaire. Elles sont très touchées par le travail partiel contraint et subissent les effets du « plafond de verre » : une limitation des carrières passé un niveau important de responsabilité. La notion de « chef de famille » pose tout le problème. Il existe un mode d’organisation du symbolique : on a du symbolique religieux mais aussi du symbolique laïc que l’état civil consolide : la statut de l’état civil, H ou F, chef de famille, etc. Lorsqu’il s’agit de professions prestigieuses, on ne souhaite guère féminiser le nom de métier afin de ne pas dévaloriser la fonction.

 Nombre de personnes sont d’accord sur le principe (« ça ne mange pas de pain »), mais il existe des gens qui ne veulent pas moins de sexisme. Les enseignants ont peur des réactions des parents d’élèves. On est tous imprégné de stéréotypes sexistes.

 Quels sont les facteurs de changement ?

 Un constat : en général, les filles veulent faire autrement que leurs mères.
 Si nous voulons que les filles s’émancipent, il faut éduquer les garçons pour qu’ils abandonnent de leurs habitudes, de leurs attitudes traditionnelles, de leurs prérogatives…
 Il faut lutter contre la division socio-sexuée du travail/des savoirs…

 Pour conclure : la différence peut être positive et riche, car elle crée de la diversité. C’est l’inégalité qui se justifie sur la différence des sexes qui n’est pas acceptable !

 Expériences scolaires, témoignages :

 Comment à travers les enseignements disciplinaires aborder la question de l’égalité filles/garçons ?
 Formation des professeurs d’E. Piet (Observatoire des violences faites aux femmes du Conseil Général) : « faire en sorte que les enseignants ne ferment pas les yeux ».
 Stratégie de violence à l’encontre des filles : ça commence par des rumeurs, des tags, des graffiti… il faut identifier la personne concernée qui sait qui lui en veut, qui souhaite se venger d’elle (par ex.. pour une aide aux devoirs non acceptée…) et prévenir l’auteur des tags avant que ne s’enchaîne que la jeune fille soit identifiée en ce qu’elle n’est pas et devienne victime d’un viol ou autres violences physiques et/ou psychologiques…
 Théâtre forum inspiré du Théâtre de l’Opprimé, les élèves de 3ème expérimentent du théâtre présenté à tous les autres niveaux de classe du collège…
 Concours de dessin sur la thématique du sexisme
 Groupe de réflexion autour de la mixité au rectorat : développement d’outils pour le rectorat, Travail avec le Réseau AVEC www.avecegalite.com : document « les chemins de l’égalité »
 Fond interministériel de prévention de la délinquance : Atelier de l’accompagnement éducatif sur l’Egalité filles/garçons animé par une Coordonnatrice Education prioritaire ; l’objectif est de réduire les comportements sexistes et de promouvoir d’une éducation non sexiste modifiant les stéréotypes sexués. Compétences du socle : compétences sociales et civiques du palier 2 + circulaire de rentrée 2010. Les séquences comprennent : 30 mn d’aide au travail scolaire + 30 mn autour des activités Les Petits égaux (outil pédagogique), textes ou dessins amorçant les discussions avec les enfants